17/10/2016 – 08H45 Lanester (Breizh-info.com) – Denis Seznec, petit fils de Guillaume Seznec, était en conférence, vendredi 14 octobre à Lanester, où il a annoncé donner sa dernière conférence sur « l’affaire Seznec ». Ce dernier – qui avait demandé à Breizh-info.com d’animer la conférence – a en effet annoncé qu’il allait étudier, le 18 novembre prochain, en compagnie de ses avocats, la possibilité d’une nouvelle révision du procès afin d’innocenter totalement son grand-père. Il a annoncé vouloir relancer la révision du procès de son grand-père, condamné en 1924 aux travaux forcés à perpétuité pour le meurtre du conseiller général finistérien Pierre Quéméneur. Un homme dont le corps n’a jamais été retrouvé. « Je rencontrerai mes sept avocats, le 18 novembre à Paris. Nous prendrons alors la décision de lancer, ou non, une demande de révision » a-t-il déclaré. A l’origine de cette requête, une balle fichée dans un volet de la maison de Pierre Quéméneur à Plourivo, près de Saint-Brieuc.
Après la conférence – qui aura visiblement touché un public passionné par le témoignage du petit fils de Guillaume Seznec – nous avons interrogé ce dernier. Breizh-info.com : Tout d’abord, que faites-vous dans la vie, Quel était votre métier avant la retraite ? Denis Guillaume Seznec : J’étais correcteur au Journal officiel et réviseur pour l’Assemblée nationale Breizh-info.com : Quelle conséquence a eu ce terrible drame sur vous et votre famille ? Denis Guillaume Seznec : Famille détruite et un combat permanent contre l’injustice qui nous a frappée Breizh-info.com : Vous ne demandez aucune indemnisation financière en cas de réhabilitation de votre grand-père malgré la ruine et la honte qui a frappé votre famille, Pourquoi ? Denis Guillaume Seznec : Il faut que cela reste un combat noble et désintéressé. Mon grand-père disait toujours « On ne fait pas d’affaires avec l’Affaire »… Breizh-info.com : Avez-vous l’occasion d’aller de temps en temps sur la tombe de votre grand-père et de votre mère à Plomodiern ? Denis Guillaume Seznec : Jeudi, justement, je suis allé fleurir leur tombe. Breizh-info.com : Combien de fois êtes-vous allez en Guyane pour mener l’enquête exceptionnelle ? Denis Guillaume Seznec : Douze ou treize fois, je n’ai pas compté J’y ai rencontré les derniers bagnards, entre autres. Désormais il n’y en a plus Breizh-info.com : Comment Quémeneur et Seznec se sont connus ? Etaient-ils amis ? Denis Guillaume Seznec : Amis est un grand mot. Ils se sont connus un peu avant la Grande Guerre.
Breizh-info.com : Pourquoi Seznec était-il le prête-nom de Quémeneur dans l’affaire des Cadillac ? Denis Guillaume Seznec : Parce que Quémeneur se présentait à la députation du Finistère, qu’il y avait beaucoup de catholiques et que le traffic des Cadillac, entre autres, s’adressait surtout au diable soviétique que les pays occidentaux boycottaient. Breizh-info.com : Où sont passés les dollars-or versés par Seznec à Quemeneur pour l’achat de Traou-Nez ? Denis Guillaume Seznec : On ne sait pas ce que Quémeneur en a fait, malgré le témoignage des deux garçons de café qui font état de la donation de ces dollars sur la terrasse du bar. Breizh-info.com : Combien valait cette propriété ? Combien Quemeneur l’avait-il acheté ? Denis Guillaume Seznec : Le prix réel était de 120 à 130 000 franc-or de l’époque. Les dollars-or de Seznec servant de dessous-de-table. Breizh-info.com : Pourquoi Quémeneur devait de l’argent au fisc ? Denis Guillaume Seznec : Il s’agit d’un bénéfice exceptionnel d’enrichissement de guerre, ce qui pourrait expliquer la thèse de sa fuite Par ailleurs, le trafic des Cadillac était caché et à mon avis, c’est la clé de cette affaire. Breizh-info.com : Le premier personnage trouble dans cette affaire est-ce Maitre Pouliquen ? Denis Guillaume Seznec : Pouliquen était notaire et a été désigné par la justice légataire universel de Quemeneur, puisque c’était une disparition. Pouliquen était donc le grand bénéficiaire de la pseudo mort de Quémeneur. Il a donc joué un rôle très trouble aux yeux de la plupart des Bretons. Breizh-info.com : Le rôle de Bonny dans l’affaire ? Pour qui travaillait-il ? Etait-il là pour cacher le secret du trafic des Cadillac ? Denis Guillaume Seznec : Bonny était un policier politique dans le mauvais sens du terme, il était là pour cacher le traffic. Breizh-info.com : Pourquoi s’acharner sur Guillaume Seznec ? Denis Guillaume Seznec : C’était le coupable idéal ! Breizh-info.com : Pouvez-vous nous dire quelques affaires dans lesquelles Bonny a joué un rôle trouble ? Denis Guillaume Seznec : L’affaire Stravinsky (escroc), l’affaire Prince (magistrat), et beaucoup d’autres. Breizh-info.com : Comment Bonny a-t-il fini sa vie ? Denis Guillaume Seznec : Après avoir été viré de la police bien avant le conflit de 1940 pour falsification de preuves dans différentes affaires criminelles, il a été fusillé pour Collaboration (il était un des chefs de la Gestapo) le 27 décembre 1944. Breizh-info.com : Quelles sont les personnes qui depuis 1924 et le procès sont revenues sur leurs témoignages ou leur participation ? Denis Guillaume Seznec : En autres, une majorité des jurés qui l’ont condamné. C’est un juge, Hervé, qui a mené la campagne en faveur de Seznec. Melle Héranval (fausse témoin de l’achat de la machine à écrire), Pansel et Boulic (les garçons de café) sont également revenus dessus pour disculper mon grand père. Breizh-info.com : Existe-t-il de nouvelles pièces au dossier ? Denis Guillaume Seznec : Les faux en écriture se sont avérés ne pas avoir été fabriqués par Guillaume Seznec . Nous avons comme fait nouveau le témoignage des marins de la Marie-Ernestine qui ont entendu des coups de feu dans la propriété de Plourivo un soir, ce qui innocentait mon Grand-Père. Breizh-info.com : A son retour du bagne, et même avant le procès, quel rôle à jouer Le Her, votre Père, qui était le principal témoin à décharge du procès de 1924 ? Denis Guillaume Seznec : François Le Her était un des cinq témoins de survie de Quémeneur. Breizh-info.com : Par ailleurs, un crâne a été trouvé à Plourivo en 1953, cela a été caché, bizarre, c’est Monsieur Lepetitcorps, fils de l’adjudant de gendarmerie, qui a retrouvé des photos et un procès-verbal … Denis Guillaume Seznec : Troublant. C’est le moins que l’on puisse dire. Breizh-info.com : Au Bagne, Seznec a-t-il réussi à s’évader ? Si oui avec Qui ? Denis Guillaume Seznec : Oui, avec le Dr Bougrat et une dizaine de bagnards. Mais il a été rattrapé. Breizh-info.com : Comment a-t-il vécu et survécu au bagne ? Denis Guillaume Seznec : 24 ans au total. Il était très respecté, considéré comme innocent. Même par le commandant. Breizh-info.com : Allez-vous faire une nouvelle demande de révision ? Denis Guillaume Seznec : Le 18 novembre 2016 la décision sera prise par l’équipe d’avocats (Bredin, Bocquet, Baudelot, Le Borgne etc.) Breizh-info.com : Grâce à votre ténacité, vous avez réussi à faire modifier la « loi Seznec sur les révisions des procès » en France, en êtes-vous fier ? Denis Guillaume Seznec : Je suis fier qu’elle ait été votée à l’unanimité le 23 juin 1989. Breizh-info.com : Pourrait-on encore, en France, envoyer en prison un justiciable pour assassinat sans cadavre, sans preuve, sans arme, sans aveu ? Denis Guillaume Seznec : Je ne pense pas. Breizh-info.com : L’argent récolté pour vos livres dédicacés va au profit de France-justice, pour quelle raison ? Denis Guillaume Seznec : Oui, ou de temps en temps, pour des libraires. On ne fait pas d’affaires avec l’Affaire… Breizh-info.com : Quel est le but de cette association ? Denis Guillaume Seznec : Au début (il y a une vingtaine d’années) France-Justice a été fondée uniquement pour la révision du procès de Guillaume Seznec, puis nous nous sommes penchés sur différentes affaires actuelles. Breizh-info.com : Selon vous y a-t-il une justice de classe ? Denis Guillaume Seznec : Depuis La Fontaine, (« que vous soyez misérable ou riche, la Justice vous rendra blanc ou noir ») selon moi, cela n’a pas changé. Breizh-info.com : Quels sont les deux systèmes judiciaires qui régentent le monde selon vous ? Denis Guillaume Seznec : Il y a deux principaux systèmes : L’Inquisitoriale (Français, l’intime conviction) ou Accusatoire (Anglo-saxon, la preuve avant tout) et j’espère de tout cœur qu’il n’y en ait pas un troisième pour nos sociétés : « la Charia ». Propos recueillis par Yann Vallerie
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