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Message non luPosté :03 avr. 2010, 23:05 
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Bonsoir,

Je me suis amusé à effectuer une analyse des différents textes mis en ligne sur le forum (les lettres de Ranucci et son Récapitulatif) avec un logiciel d'analyse de texte.

L'analyse de texte peut être intéressante pour notre affaire, on le sait que derrière l'Ecrit se cache l'Homme (Buffon: "le style c'est l'Homme)… Et je me suis dit que pour Ranucci cela pouvait être intéressant d'analyser ce qu'il avait laissé comme écrit -écrit en recherche "plein texte" que Ludivine a généreusement tout mis en ligne: travail gargantuesque, toutes mes félicitations! eclap Il s'agissait alors plus que de reprendre ces textes, de les adapter avec un traitement de texte pour les mettre dans le soft.

En gros, ce logiciel d'analyse de texte a -entre autres- comme possibilité de regrouper les mots dans des grandes catégories lexicales dont chacune a son importance: les verbes, les connecteurs, les modalisations, les adjectifs qualificatifs, les pronoms personnels. Le logiciel détermine dans chacune de ces catégories des sous-catégories dans lesquels il place les mots:

Ainsi, je vous en donne une brève descriptions
1) pour les verbes, on a comme sous catégories:
a. les verbes factifs qui expriment des actions ("travailler", "marcher",...);
b. les verbes statifs qui expriment des états ou des notions de possession ("être", "rester",...);
c. les verbes déclaratifs qui expriment une déclaration sur un état, un être, un objet, ("dire", "croire",...);
d. enfin les verbes performatifs qui expriment un acte par et dans le langage ("promettre", "exiger",...).

2) pour les connecteurs (conjonctions de coordination et de subordination, locutions conjonctives) qui relient des parties de discours, on a:
a. des conditions ("si", "dans l’hypothèse", "au cas où", ...);
b. des causes ("parce que", "puisque", "car", "donc", ...);
c. des buts ("pour que", "afin de", ...);
d. des additions ("et", "ensuite", "puis"...);
e. des disjonctions ("ou ... ou", "soit ... soit", ...);
f. des opposition ("mais", "cependant", "toutefois", ...);
g. des comparaisons ("comme", "tel que", "ainsi que", ...);
h. des locutions de temps ("quand", "lorsque" , "avant que", ...);
i. des locutions de lieu ("où", "jusqu’où", ...).

3) pour les modalisations (adverbes ou locutions adverbiales), qui permettent à celui qui parle de s'impliquer dans ce qu'il dit, ou de situer ce qu’il dit dans le temps et dans l’espace, on a celles:
a. de temps ("maintenant", "hier", "demain", ...);
b. de lieu ("là-bas", "en haut", "ici", ...);
c. de manière ("directement", "ensemble", ...);
d. d'affirmation ("tout à fait", "certainement", ...);
e. de doute ("peut-être", "probablement", ...);
f. de négation ("ne...pas", "ne...guère", "ne...jamais", ...);
g. d'intensité ("très", "beaucoup", "fortement", ...).

4) pour les adjectifs, on a des adjectifs:

a. "objectifs" permettent de caractériser des êtres ou des objets, indépendamment du point de vue du locuteur (par exemple les adjectifs de couleur);

b. "subjectifs" indiquent une appréciation sur quelque chose ou quelqu'un, ils permettent
d’exprimer le point de vue du locuteur ("intéressant","gentil","agréable", ...);

c. "numériques" regroupent les nombres (en lettres ou en chiffres) et les adjectifs ordinaux et cardinaux.

D’un point de vue général, on peut dire que :
1. les connecteurs et modalisations de temps et de lieu permettent de situer l’action;
2. les modalisations d’intensité et de négation permettent de dramatiser le discours;
3. les connecteurs de cause et de condition permettent de construire un raisonnement;
4. les connecteurs d’addition permettent d’énumérer des faits ou des caractéristiques;
5. plus particulièrement, les connecteurs d’opposition permettent à la fois d’argumenter,
de relativiser et de présenter des points de vue opposés.


J'ai donc examiné de manière séparée le Récapitulatif et les lettres de CR à sa mère.

Relativement au Récapitulatif, on constate sur l'ensemble du texte (le calcul des 100% est toujours pour chacune des catégories ci-dessous

a) que, pour les verbes, ce sont ceux qui expriment des actions qui sont les plus nombreux (les verbes factifs) (50%), suivis des verbes "statifs" (26%) et des "déclaratifs" (23%). On trouve seulement 1% de verbe performatif.

b) pour les connecteurs, on trouve seulement un petit nombre utilisé de ceux-ci servant à l'établissement de raisonnement et d'argumentation, soit 25% (connecteurs de cause et de conditions (13%), connecteurs de but (1%), connecteurs d'opposition (11%)). Par contre les connecteurs d'addition servant à énumérer des faits ou des caractéristiques sont en très grand nombre (57%), en sus, mais en moins grand nombre, de la présence de connecteurs servant à relier des propositions en séparant les idées (6%): en additionnant des deux derniers, on trouve un total de 63% de connecteurs simplement servant à juxtaposer les faits mais qui ne peuvent servir de manière lexicale à une argumentation quelconque.

c) du point de vue des modalisations, le système génère principalement sur la base du texte la grande présence des modalisations de négation et d'intensité, qui servent de manière générale à dramatiser et intensifier le discours: on trouve ainsi, sur l'ensemble des modalisations, 19% de modalisations servant à la négation et 32% dévolues seulement à l'intensité du discours, soit 51% de ces modalisations servant une dramatisation du discours. Si les modalisations de temps et de lieu sont aussi bien présentes à 30% (temps: 17%, lieu: 13%), le reste des modalisations comptées est bien faible: les modalisations d'affirmation du narrateur (ou le narrateur s'implique) ne sont qu'à 7%, les modalisations de nuance du discours ne représentent que 10%, et les modalisations de doute elles ne représentent qu'1%!

d) enfin on trouve dans le Récapitulatif un nombre d'adjectifs "objectifs" un peu plus élevés (38%) que les subjectifs (32%) présents en grand nombre; et 31% d'adjectifs numériques.

Le Récapitulatif apparait donc être un discours dépourvus de grande argumentation, mais avec un grand nombre d'énumérations de données (faits, temps, lieu etc) et surtout pourvu de mots spécifiques servant à dramatiser et intensifier sa langue, avec beaucoup de termes de négation.

Lorsqu'on regarde aussi la composition chronologique du texte, si l'on analyse en coupant le texte en tranche, on constate une baisse régulière du pourcentage des adjectifs "subjectifs", en comparaison de la tendance du pourcentage des adjectifs "objectifs" qui ont tendance a être augmentés dans le texte. Pour le reste, il semble que la composition soit homogène du début à la fin du Récapitulatif.

Maintenant, ce qui est intéressant de voir, c'est que les données du contenu des lettres de Ranucci donnent approximativement le même résultat (j'ai pris le texte des lettres débarrassés des dates, des formules de politesse, etc):

On y trouve:

a) 43% de verbe de verbe factif, 30% de verbe statif, 27% de verbe déclaratif et 1% de verbe performatif –on reste donc dans les mêmes ordres de grandeur du Récapitulatif

b) on trouve 32% de connecteurs servant au raisonnement et à l'argumentation (17% connecteurs de cause et de conditions, 1% connecteur de but, 14% connecteur d'opposition), par contre on trouve un grand nombre de pourcentage de connecteurs servant à énumérer des faits (45%) ou servant à relier des propositions en séparant les idées (8%), soit un total de 53% de ces connecteurs qui ne servent pas à des propos argumentatifs - à nouveau même ordre de grandeur du Récapitulatif

c) enfin pour les modalisations, on trouve aussi un grand nombre de modalisations dramatisant le discours, à 58% (20% négation, 38% intensifiant le discours), 24% de modalisations de temps et de lieu permettant de situer l'action (16% de temps, 8% de lieu), 8% de modalisations nuançant le discours, 7% de modalisations affirmatives (ou le narrateur s'affirme) et 2% de modalisation de doute du discours - à nouveau même ordre de grandeur du Récapitulatif.

d) enfin, différence avec le Récapitulatif, le nombre d'adjectifs objectifs (33%) est plus bas que les subjectifs (37%) et que les numériques (30%)

De manière générale, lorsqu'on compare chronologiquement tout le corpus de lettres, on observe une petite tendance avec la chronologie des lettres à l'accroissement du nombre de connecteurs servant à énumérer les faits, et un faible décroissement des connecteurs d'opposition et de comparaison.

Bien entendu, je ne suis pas spécialiste de l'analyse de texte, mais je trouve intéressant ces résultats passés à la moulinette de l'analyse de texte de software actuelle très puissant pour une meilleure connaissance de la personnalité de Ranucci, comprendre son sempiternel "Négatif", son attitude au procès (ou il n'a pas su se défendre, et ses textes montrent combien sa rhétorique d'argumentation est faible au travers de l'analyse de ses mots employés), et son discours clamé sur son innocence dans son Récapitulatif (qu'il savait être publié) et de ses lettres à sa mère.

Voilà je laisse à votre analyse ces données…


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Message non luPosté :04 avr. 2010, 22:18 
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Euh... ça se mange???


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Message non luPosté :05 avr. 2010, 07:27 
J'ai pas tout compris mais franchement je ne crois pas que ce soit très convaincant pour se forger une opinion solide.

En plus, il manque des lettres de C Ranucci à sa mère. Elles ont été saisies par ses geoliers parce qu'elle relatait l'affaire.
Et je ne serais pas étonné que son Récapitulatif ait été quelque peu nettoyé.


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Message non luPosté :05 avr. 2010, 09:53 
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J'ai pas tout compris mais franchement je ne crois pas que ce soit très convaincant pour se forger une opinion solide.

En plus, il manque des lettres de C Ranucci à sa mère. Elles ont été saisies par ses geoliers parce qu'elle relatait l'affaire.
Et je ne serais pas étonné que son Récapitulatif ait été quelque peu nettoyé.
disons que ce sont les sources de sa part qui nous restent... épuré ou non, (là on n'est dans le registre de votre hypothèse, car il me semble que le Récapitulatif est homogène du point de vue de sa rédaction), cela reste que vous le vouliez ou non un document historique de sa propre main...

bien entendu, on en tire ce que l'on en peut de ce genre d'analyse: mais étudier l'argumentation du Récapitulatif, voire des lettres, soit de la manière dont ils ont été écrits, et bien entendu ici ce n'est que le résultat d'une esquisse, permet dans mon hypothèse d'apporter des éléments pour mieux saisir la personnalité de CR. Bien entendu, je ne prétends pas dedans voir sa culpabilité ou son innocence...

mais aborder d'autres chemins que les traditionnels chemins battus que l'on connait tous et qui ont été (sur)rabachés peuvent peut-être se révéler intéressant...


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Message non luPosté :05 avr. 2010, 10:15 
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Et je ne serais pas étonné que son Récapitulatif ait été quelque peu nettoyé.
jpasc95, CR se méfiait du controle de l'Autorité de Surveillance et il a tout fait pour que son Récapitulatif arrive en entier, il avait fait 1 copie (en 2 parties?) + 1 brouillon qu'il devait cacher peut être dans sa cellule:

voila ce qu'il écrit le 23 mai 76: " L'avocat n'est pas venu cette semaine. Je l'espère pour le début de la semaine prochaine. Pour ce qui est du récapitulatif (merci pour les deux enveloppes brunes, indispensables), je le posterai en même temps que cette lettre, demain matin au café. Il le recevra donc en deux épaisses enveloppes mercredi 26 ou jeudi 27; j'ai ici un double (c'est le brouillon) que je conserverai, mais je dirai sur un petit mot glissé dans les enveloppes de faire deux copies. Je lui dirai d'en conserver une pour Lombard et lui, de t'en donner une, et de remettre dès la réception l'original à Mlle E. Lombard pour la rédaction"

je doute que l'AS ait retapé le texte -moins de moyens qu'aujourd'hui :? - pour sa sortie des Baumettes; en plus le brouillon a du être récupéré à la mort de CR par ses avocats et sans doute l'ont-ils comparé avec la version sortie de prison de fin mai 76...

le Récapitulatif est donc la pièce la plus complète que nous disposons des écrits de CR, et à mon sens elle a été sous-exploitée...


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Message non luPosté :06 avr. 2010, 11:49 
Merci pour ces précisions que j'ignorais, Pat. Cela enlève donc de l'eau à l'hypothèse d'un récapitulatif tronqué.
Il est juste toutefois de dire qu'il manque une page.


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Message non luPosté :06 avr. 2010, 12:18 
Citation :
Pat
disons que ce sont les sources de sa part qui nous restent... épuré ou non, (là on n'est dans le registre de votre hypothèse, car il me semble que le Récapitulatif est homogène du point de vue de sa rédaction), cela reste que vous le vouliez ou non un document historique de sa propre main...

bien entendu, on en tire ce que l'on en peut de ce genre d'analyse: mais étudier l'argumentation du Récapitulatif, voire des lettres, soit de la manière dont ils ont été écrits, et bien entendu ici ce n'est que le résultat d'une esquisse, permet dans mon hypothèse d'apporter des éléments pour mieux saisir la personnalité de CR. Bien entendu, je ne prétends pas dedans voir sa culpabilité ou son innocence...

mais aborder d'autres chemins que les traditionnels chemins battus que l'on connait tous et qui ont été (sur)rabachés peuvent peut-être se révéler intéressant...
Je trouve que votre mode d'analyse est probablement intéressant et que comme vous le dites, étant donné le peu d'éléments dont nous disposons pour essayer de progresser dans la recherche de la vérité, il est légitime d'exploiter ceux que nous avons. Et tous les éclairages sont intéressants.

J'aurais cependant tendance à vous dire ce que j'ai dit un jour à Cell, qui a choisi - et cela ne manque pas d'intérêt non plus - de considérer essentiellement l'affaire Ranucci sous l'éclairage psychanalytique :

Je ne pense pas qu'une énigme criminelle puisse être résolue par le seul biais du décryptage de la personnalité des protagonistes de l’affaire examinée.

L’étude des caractères n’est certes pas inutile et peut bien sûr permettre de conforter ou d’infirmer une hypothèse. Mais elle ne peut prévaloir sur les faits concrets, qui sont généralement têtus.

C’est ainsi par exemple que, lorsque Cell, considérant la chose selon une lecture strictement psychanalytique déclare en substance – pardonnez-moi de vous citer approximativement, Cell, mais je pense avoir compris l’esprit de votre thèse, même si je n’en respecte pas la lettre – que «le parcours de vie de CR est tel qu’il ne pouvait pas ne pas avoir eu l’intention de voir son père lors de sa virée de Pentecôte », je souscris sans peine à cette analyse. Mais lorsqu’il en conclut que « puisque ce désir de visite était inévitable, cette visite a forcément eu lieu », je ne suis plus d’accord.
Il faut compter avec les empêchements matériels, avec les contretemps, avec les maints aléas du quotidien qui font qu’une chose qui avait effectivement (psychologiquement parlant ) toutes les raisons de se produire ne se produit parfois pas.
Pour en revenir à l’exemple que je donne, je tiens personnellement pour certain que CR avait l’intention de voir son père mais je ne pense pas qu’il soit possible de dire s’il l’a fait ou non.

Même chose avec votre étude très originale du caractère possible de CR : elle ne manque probablement pas d’intérêt mais, quelle que soit la conclusion qu’on peut en tirer, cette conclusion ne peut constituer qu’un moyen de recherche additionnel.


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Message non luPosté :06 avr. 2010, 14:44 
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Merci pour ces précisions que j'ignorais, Pat. Cela enlève donc de l'eau à l'hypothèse d'un récapitulatif tronqué.
Il est juste toutefois de dire qu'il manque une page.
merci Danou.

étonnant cette histoire de page manquante, puisque les avocats ont reçu une version complète et que le brouillon était en main de CR;
or qu'est devenu ce brouillon original? cette page manque-t-elle ds la copie donné par CR en 76? le brouillon (de prison) a t il été rendu à la famille par l'Autorité Judiciaire?...

que de questions étonnates et de mystère rien que sur l'histoire de ce Récapitulatif et sur les lettres manquantes (est ce que ce sont simplement des pages perdues? je ne sais pas cela clairement car je n'ai eu comme source que les versions mises en ligne sur le forum)...

Bref, si pages perdues, c'est surtout que l'on n'a pas trop regardé, on ne s'est pas bcp occupé de ces documents écrits et comment ils ont été rédigés, c'est surtout parce que personne ne s'y intéressait. il est vrai que l'analyse lexcicographique et linguistique des écrits d'un inculpé (puis d'1 guillotiné n'intéressaient alors guère que les littéraires en France, jamais juges et avocats, ni d'ailleurs les psychiatres penchés sur le cas...

(NB: j'ai remarqué qu'en France les disciplines d'étude sont très compartimentées (étaient; par exemple on ne mélange guère l'historique au sociologique pour étudier et comprendre les faits historiques, les Anglos-saxons le font bcp plus que nous etc)... et je pense que c'est ca l'erreur: une personnalité ne peut être comprise qu'au niveau de tout ce qu'elle laisse... et pas seulement au niveau des témoignages des gens qui la connaissaient...)

bon je m'égare, bref, je suis d'accord en partie avec vous, mais croire à l'innocence c'est aussi penser que ce type dans sa personnalité ne pouvait faire 1 crime aussi sordide... y a vraiment quelque chose qui cloche quand on lit du Christian Ranucci (ses lettres, son Récapitulatif) et qu'on pense que la justice le désigne coupable de ce crime sordide..


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Message non luPosté :06 avr. 2010, 15:15 
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Pat
bon je m'égare, bref, je suis d'accord en partie avec vous, mais croire à l'innocence c'est aussi penser que ce type dans sa personnalité ne pouvait faire 1 crime aussi sordide... y a vraiment quelque chose qui cloche quand on lit du Christian Ranucci (ses lettres, son Récapitulatif) et qu'on pense que la justice le désigne coupable de ce crime sordide..

Justement, je n'en sais rien.
Il existe tellement de cas de criminels (avérés) qui, avant de le devenir, étaient, de l'avis de tous ceux qui les connaissaient bien, des gens comme tout le monde. Ni meilleurs ni pires.

Sans compter ceux qui, avant de commettre un crime, parfois atroce, étaient unanimement estimés, voire adorés et admirés de tous.

J'ai même l'impression que les cas où le dérangement mental d'un criminel est facilement repérable, comme par exemple dans le cas de Francis Heaulmes, sont assez rares.
(encore ne peut-on dire cela qu'après coup. Avant de savoir que FH était un tueur en série, pouvait-on, simplement parce qu'il avait une drôle de gueule et un comportement bizarre, deviner en lui un tempéramment de tueur ? Beaucoup de simples d'esprit sont innofensifs.)

Alors qu'il est presque la règle, lorsqu'on arrête un assassin, de recueillir des témoignages unanimement élogieux ("J'aurais pu croire cela de n'importe qui sauf de lui !" "Comment aurait-on pu croire que cette femme, si gentille avec tout le monde, si bonne mère avec ses autres enfants, aurait pu martyriser pendant des années dans un placart cet autre enfant ?!?!?!" "C'était un homme adorable, je lui aurais confié mes enfants les yeux fermés", etc.).

Au point que j'en arrive parfois à me demander s'il existe une seule personne au monde dont on puisse affirmer qu'elle soit incapable de devenir criminelle.

Plus j'avance en âge et moins je comprends quelque chose aux mécanismes qui régissent nos comportements.


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Message non luPosté :06 avr. 2010, 15:21 
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Et je ne serais pas étonné que son Récapitulatif ait été quelque peu nettoyé.
jpasc95, CR se méfiait du controle de l'Autorité de Surveillance et il a tout fait pour que son Récapitulatif arrive en entier, il avait fait 1 copie (en 2 parties?) + 1 brouillon qu'il devait cacher peut être dans sa cellule:

voila ce qu'il écrit le 23 mai 76: " L'avocat n'est pas venu cette semaine. Je l'espère pour le début de la semaine prochaine. Pour ce qui est du récapitulatif (merci pour les deux enveloppes brunes, indispensables), je le posterai en même temps que cette lettre, demain matin au café. Il le recevra donc en deux épaisses enveloppes mercredi 26 ou jeudi 27; j'ai ici un double (c'est le brouillon) que je conserverai, mais je dirai sur un petit mot glissé dans les enveloppes de faire deux copies. Je lui dirai d'en conserver une pour Lombard et lui, de t'en donner une, et de remettre dès la réception l'original à Mlle E. Lombard pour la rédaction"

je doute que l'AS ait retapé le texte -moins de moyens qu'aujourd'hui - pour sa sortie des Baumettes; en plus le brouillon a du être récupéré à la mort de CR par ses avocats et sans doute l'ont-ils comparé avec la version sortie de prison de fin mai 76...

le Récapitulatif est donc la pièce la plus complète que nous disposons des écrits de CR, et à mon sens elle a été sous-exploitée...
Libre à vous d'y croire.

Tout ce qui entrait et sortait des Baumettes était controllé par l'autorité pénitentiaire. J'ai donné l'exemple des lettres.
Après son exécution, Mme Mathon n'a pas pu récupérer toutes les affaires de son fils. En tout cas, elle n'a jamais écrit qu'elle avait récupéré le brouillon du Récapitulatif conservé par lui.
Me le Forsonney, dans son livre, n'évoque même pas ce récapitulatif de C Ranucci.


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Message non luPosté :06 avr. 2010, 15:28 
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oui, mais ce qui est remarquable dans le cas Ranucci c'est la quantité de documents que l'on a de lui...

il est rare d'avoir une correspondance entière + 1 écrit de plusieurs pages d'1 meurtrier... et puis ce Récapitulatif est pour le moins original dans la démarche, cette volonté de clamer par l'Ecriture son Innocence...

d'où ma sempiternelle question: pkoi une page manque-t-elle au Récapitulatif? et est-ce bien le cas dans l'Edition d'Hachette de 76? comment celà est-il possible au vu de 2 copies existantes + du brouillon originel?...

pour la correspondance, jpasc95 a ss doute 1 bonne interprétation? mais pour le Récapitulatif?? le brouillon a t il été écrit d'1 seul jet? présente-t-il des mots raturés pex.?

je suis étonné -je ne le répéterais pas assez- combien on a a peu de données sur ce document...

et à propos, dans la correspondance, CR parle d'1 Jean qu'il connaissait bien: sait-on qui est ce Jean (en tout cas c'est pas son père :) ca c'est certain...)


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Message non luPosté :06 avr. 2010, 15:33 
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Enregistré le :08 mai 2005, 22:47
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Citation :
[...]
Me le Forsonney, dans son livre, n'évoque même pas ce récapitulatif de C Ranucci.
cela ne m'étonne pas: en France, il y a (il y avait, cela change) claire compartimentation des savoirs dans les analyses, comme je l'ai dit plus haut;
dans sa logique propre, Le Forsonney ne pouvait donc s'intéresser aux écrits de CR; et c'est vrai qu'il n'en parle jamais...


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Message non luPosté :06 avr. 2010, 16:05 
Citation :
Pat
cela ne m'étonne pas: en France, il y a (il y avait, cela change) claire compartimentation des savoirs dans les analyses, comme je l'ai dit plus haut;
dans sa logique propre, Le Forsonney ne pouvait donc s'intéresser aux écrits de CR; et c'est vrai qu'il n'en parle jamais...
La raison que je vois à ce silence de Jean-François Le Forsonney sur les écrits de CR rejoindrait un peu, dans une certaine mesure, ce que vous dites sur la compartimentation des savoirs : Jean-François Le Forsonney se comporte avant tout, dans ses écrits, en avocat. S'il ne cite pas le Récapitulatif, c'est probablement parce que, même si, sur le plan humain ou psychologique, il a pu y trouver des éléments intéressants, il n'y a pas trouvé d'éléments juridiquement exploitables pour la défense.
Juridiquement, les états d'âme d'un accusé ne sont pas exploitables. Seuls les faits le sont.

Et autant que je me souvienne, on ne trouve guère dans le Récapitulatif de faits à décharge incontestables, prouvés, avérés. Donc, exploitables. Donc, pour un avocat, dignes d'être mentionnés.

Le seul passage à mon sens vraiment très bien argumenté de ces écrits est celui où CR explique le mécanisme qui l'a poussé aux aveux : l'exploitation par les policiers de ce trou noir dans ses souvenirs pour lui démontrer sa culpabilité. Je trouve que ce passage a une certaine force de conviction.
Mais même cette page n'est probablement pas très intéressante du point de vue de l'avocat parce qu'elle ne mentionne rien que l'on puisse prouver.


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Message non luPosté :06 avr. 2010, 16:24 
Citation :
Citation :
Pat
cela ne m'étonne pas: en France, il y a (il y avait, cela change) claire compartimentation des savoirs dans les analyses, comme je l'ai dit plus haut;
dans sa logique propre, Le Forsonney ne pouvait donc s'intéresser aux écrits de CR; et c'est vrai qu'il n'en parle jamais...
La raison que je vois à ce silence de Jean-François Le Forsonney sur les écrits de CR rejoindrait un peu, dans une certaine mesure, ce que vous dites sur la compartimentation des savoirs : Jean-François Le Forsonney se comporte avant tout, dans ses écrits, en avocat. S'il ne cite pas le Récapitulatif, c'est probablement parce que, même si, sur le plan humain ou psychologique, il a pu y trouver des éléments intéressants, il n'y a pas trouvé d'éléments juridiquement exploitables pour la défense.
Juridiquement, les états d'âme d'un accusé ne sont pas exploitables. Seuls les faits le sont.

Et autant que je me souvienne, on ne trouve guère dans le Récapitulatif de faits à décharge incontestables, prouvés, avérés. Donc, exploitables. Donc, pour un avocat, dignes d'être mentionnés.

Le seul passage à mon sens vraiment très bien argumenté de ces écrits est celui où CR explique le mécanisme qui l'a poussé aux aveux : l'exploitation par les policiers de ce trou noir dans ses souvenirs pour lui démontrer sa culpabilité. Je trouve que ce passage a une certaine force de conviction.
Mais même cette page n'est probablement pas très intéressante du point de vue de l'avocat parce qu'elle ne mentionne rien que l'on puisse prouver.
Pourtant, par exemple, quand C Ranucci écrit qu'il n'a jamais possédé ni souhaité posséder un couteau à cran d'arrêt, ça n'aurait pas du interpeller son avocat ?
Malheureusement, aussi incroyable que celui puisse paraitre, il faut croire que non puisque dans son livre, Le Forsonney élude la question.

ca tranche singulièrement avec ce qu'en rapporte l'avocat quelques heures avant le procès indiquant que son client lui aurait assuré être le propriétaire du couteau.
Durant le procès, il dira le contraire et dans son Récapitulatif, il maintiendra cette position.
De cela, au moins, on est sûrs. Il l'a dit et écrit.


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Message non luPosté :06 avr. 2010, 16:28 
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sans doute Danou, et c'est la bien le problème: pour vous ce n'est pas exploitable, pour moi je pars du principe opposé (du moins j'ouvre la question).

et voici 1 article sur lequel je défends mes positions:

"la sociolinguistique au secours des juristes"

http://www.erudit.org/revue/CRIMINO/199 ... 7305ar.pdf

je vous livre sa conclusion pour aller droit au but:

"Finalement, une expertise à caractère sociolinguistique, reposant sur les liens unissant langage et société, pourra nous permettre d'établir les rapports existant entre le profil socio-économique d'un prévenu (défini à partir de critères tels l'âge, le sexe, la scolarité, le milieu d'origine, etc.) et le type de production linguistique auquel l'on serait en droit de s'attendre. Dans le cas où survient une incompatibilité, confirmée par une vérification du discours, parlé ou écrit, antérieur et ultérieur au délit, une possible influence extérieure, lors de la déclaration statutaire, ou un faux témoignage, s'il s'agissait d'une accusation de libelle ou de menaces de mort, devient alors plausible. Par ailleurs, la connaissance et la maîtrise des diverses connotations sociales caractérisant différents mots, différentes tournures utilisés devant la cour pourront sans aucun doute constituer un atout majeur pour l'avocat désireux d'inciter un témoin à s'exprimer ou de convaincre juge et jury de la justesse de ses propos.

La sociolinguistique ne constitue pas une nouvelle arme pour l'avocat; celle-ci était déjà entre ses mains. Nous croyons toutefois que cette science est en mesure de lui fournir l'occasion de saisir toute la dimension structurelle de la langue, tout ce côté prévisible, non aléatoire se rattachant à cet ensemble de symboles indispensables à la compléxité de la communication humaine. Et ce n'est qu'une fois ce postulat connu et reconnu par le milieu juridique que ce dernier pourra véritablement exploiter les innombrables ressources se rapportant à l'analyse sociolinguistique en cour de justice"

...bon, écrit par 1 Québécois;


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