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 Sujet du message : Grandes erreurs judiciaires.
MessagePosté :10 nov. 2008, 10:12 
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Enregistré le :29 août 2008, 09:55
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France Loisirs.
Quoi de plus révoltant que l'erreur judiciaire, lorsque la Justice n'a pas su découvrir la vérité et accable un innocent afin d'apporter l'éclairage nécessaire sur ces épisodes sombres de l'histoire judiciaire française, cet ouvrage retrace le déroulement de dix grandes affaires - erreurs ou dysfonctionnements de la Justice - du XVIIIe siècle à nos jours.

Jean Calas, le Courrier de Lyon, Alfred Dreyfus, Guillaume Seznec, Jean-Marie Deveaux, Roland Agret, Patrick Dils, Omar Raddad, Outreau... les affaires présentées ici sont toutes emblématiques du combat qui oppose l'individu, armé de sa seule innocence, à la machine judiciaire lorsqu'elle se fourvoie.

Ces dossiers nous permettent de comprendre la mécanique perverse qui s'enclenche lorsqu'aux déductions hâtives des enquêteurs, se joignent faux témoignages et malveillance, expertises douteuses ou contradictoires, fragilité des suspects, obscurantisme religieux, pression des médias et de l'opinion publique... Il ne reste alors aux accusés que la force de leur détermination, la combativité fidèle de leurs avocats, de leurs proches et, parfois, l'engagement d'intellectuels humanistes.

Gardons à l'esprit que ces affaires sont avant tout des histoires humaines, de destins brisés, de souffrances indicibles, de longs et poignants combats d'hommes et de femmes pour tenter de prouver leur innocence. Et c'est l'honneur de l'institution judiciaire que de reconnaître ses errements, hors de la voie qui devrait toujours être la sienne, celle de la recherche de la vérité.



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Olivier Proust : "La justice est capable de se remettre en question"
Olivier Proust, avocat au Barreau de Paris et co-auteur de "Grandes erreurs judiciaires", a répondu à vos questions sur ce sujet d'actualité sensible.


Olivier Proust
"La médiatisation d'une affaire judiciaire permet de réouvrir un dossier "

Quelle est la définition juridique de l'erreur judiciaire ?

Olivier Proust : Au sens juridique du terme, l'erreur judiciaire se définit comme l'annulation d'une condamnation judiciaire pénale à la suite de la révision du procès de la personne condamnée.


L'erreur judiciaire est un sujet d'actualité important : est-ce à dire qu'il y a aujourd'hui plus d'erreurs judiciaires ou bien qu'elles sont davantages reconnues ?

Je ne pense pas qu'aujourd'hui il y ait d'avantage d'erreurs judiciaires mais depuis quelques temps, les affaires judiciaires qui ont été reconnues comme erreur judiciaire ont été très médiatisées. Par ailleurs, la loi de 1989, qui réforme la procédure de révision des condamnations pénales, a élargi les cas d'ouverture d'une révision éventuelle d'une affaire judiciaire.


La presse est-elle un bon outil pour faire reconnaître une erreur judiciaire ? Si oui, est-ce que cela signifie que, lorsque la justice montre ses limites, il faut en appeler à l'opinion publique ?

Oui, la presse et la médiatisation d'une affaire judiciaire sont des moyens de faire reconnaître une erreur judiciaire et éventuellement d'accélérer la réouverture d'un dossier. De plus, l'opinion publique peut également jouer un rôle important en influant sur le cours de la procédure (par exemple, affaires d'Outreau ou Omar Raddad).


Quelle a été la place des intellectuels (je pense à Zola et à son "J'accuse" ou encore au rôle de Voltaire dans l'affaire Calas) dans la défense d'accusés à tort ?

En effet, de grands intellectuels ont apporté leur pierre à l'édifice dans de grandes affaires judiciaires. Ainsi, le "J'accuse" de Zola est resté un modèle de pamphlet journalistique. Plus récemment, le rôle des intellectuels a consisté à sensibiliser l'opinion publique et à apporter un soutien au condamné (par exemple, affaires Marie Besnard, Roland Agret, Patrick Dils).



Le système judiciaire français a-t-il produit plus d'erreurs judiciaires que d'autres systèmes judiciaires, le système anglo-saxon, par exemple ?
Je ne pense pas. Malheureusement, il n'existe pas de système judiciaire parfait. Aux Etats-Unis par exemple, de nombreux condamnés à mort sont en fait innocents.


Olivier Proust
"Seuls les crimes ou délits peuvent faire l'objet d'une révision"

Mais à trop vouloir faire de la place au sentiment de "l'opininon" n'accroît-on pas le risque de rendre une justice "populaire" et donc non objective?

Le risque de vouloir faire trop de publicité à une affaire judiciaire présente des avantages comme des inconvénients. On l'a vu récemment avec l'affaire d'Outreau où les médias ont, dans un premier temps, participé à l'accusation des détenus avant de faire un revirement complet au moment du procès. De même, dans les affaires Marie Besnard ou Christine Villemin : les mis en examen ont d'abord été considérés comme coupables par la presse.


Puisqu'une erreur judiciaire est du domaine du pénal, celasignifie-t-il que sont exclues toutes les décisions de juges des familles (qui peuvent également faire des erreurs conséquentes sur la vie d'adultes et d'enfants...) ?

Dans un sens juridique, oui, puisque seules les affaires ayant abouti à une condamnation pénale (crimes ou délits) peuvent faire l'objet d'une révision. Cependant, dans un sens plus large, des erreurs sont commises par la Justice dans tous les domaines, y compris le domaine de la famille.


Quelles sont les lois qui nous protègent de l'erreur judiciaire ?

Certaines erreurs judiciaires ont provoqué des réformes pénales. Ainsi, l'affaire Patrick Dils a inspiré en partie la loi du 15 juin 2000 sur la présomption d'innocence, qui a introduit l'appel en matière pénale ainsi que la vidéosurveillance des gardes-à-vue pour les mineurs. Egalement, le drame de l'affaire d'Outreau a inspiré une réforme de la procédure pénale qui a été examinée à l'Assemblée nationale en novembre 2006 et qui devrait renforcer les droits de la défense.


Qui paye la facture des vies brisées par des erreurs judiciaires (je pense aux victimes de l'affaire d'Outreau) ?

Une personne détenue à tort ou acquittée à la suite de la révision de son procès obtient de droit une indemnisation payée par l'Etat dont le montant varie au cas par cas. Sur le plan humain, les victimes d'erreurs judiciaires (telles que les acquittés d'Outreau) essayent de reconstruire leurs vies comme ils le peuvent mais non sans difficulté.


Quel intérêt avez-vous, en tant qu'avocat, à venir nous parler des grandes erreurs judiciaires ?

En tant qu'avocat, il m'a paru intéressant de participer à un ouvrage qui retrace certaines des grandes erreurs judiciaires qui ont marqué notre histoire et de sensibiliser ainsi davantage le grand public sur les mécanismes de notre système judiciaire.
Olivier Proust
"Certaines erreurs judiciaires ont provoqué des réformes pénales"

Y a -t-il des constantes dans la manière dont se sont déroulées les affaires qui ont donné lieu à des erreurs judiciaires ?
Certainement, il y a des constantes dans les causes des erreurs judiciaires: une enquête bâclée (par exemple, les affaires Patrick Dils ou Outreau), des pistes négligées (affaire Omar Raddad) ou privilégiées. De plus, les affaires judiciaires révèlent souvent des aveux extorqués à la suite d'intimidations durant la garde-à-vue comme dans les affaires Patrick Dils et Jean-Marie Deveaux. Les erreurs sont également dues à l'absence de preuves matérielles (affaire d'Outreau) ou à la perte de preuves (ainsi, dans l'affaire Patrick Dils, les scellés ont été détruits ce qui n'a pas permis de faire des tests ADN sur certaines preuves).


Comment se fait-il que la justice mette tant de temps à reconnaître ses erreurs ? Ne faut-il pas que cela change pour que l'on puisse parler de "procès équitable"?

Comment faire en sorte que la justice fonctionne plus vite ?
Cela dépend des affaires : dans certaines, l'erreur judiciaire a été reconnue longtemps après la condamnation de l'accusé (exemple : Patrick Dils) mais à l'inverse, dans l'affaire d'Outreau, la justice a reconnu immédiatement l'erreur au cours du procès. Parfois, les affaires sont très longues faute d'éléments nouveaux permettant de rejuger l'affaire (affaire Seznec).


Quelle est la fréquence de l'erreur judiciaire ?

Depuis 1945, peu d'erreurs judiciaires ont été reconnues (environ huit). En attente d'une révision, il y en a certainement plus. On l'a vu hier avec l'examen par la Commission de révision des condamnations pénales de l'affaire Mis et Thiennot (deux personnes condamnées en 1947 à 15 ans de travaux forcés).


Ne pensez-vous pas que tous ceux qui contribuent à la production d'erreurs judiciaires (les journalistes notamment) devraient pouvoir être sanctionnés ?

Il existe des sanctions pénales à l'encontre des personnes (journalistes ou autres) qui accusent les personnes mises en examen avant d'être jugées. Cela constitue une atteinte à la présomption d'innocence ou une diffamation et de tels faits constituent des délits.


Quelles réformes ont été mises en place dans l'histoire pour éviter les erreurs judiciaires ? Lesquelles ont été efficaces et lesquelles ont été inefficaces ?

Principalement, la loi du 23 juin 1989, qui a été inspirée par l'affaire Seznec et qui a modifié la procédure de révision des condamnations pénales. Auparavant, la révision n'était possible que si des faits nouveaux innocentaient le condamné. Depuis 1989, il faut apporter la preuve de faits de nature à faire naître un doute sur la culpabilité du condamné. Par exemple, dans l'affaire Patrick Dils, la révision a été accordée en raison de la preuve de la présence de Francis Heaulme sur les lieux du crime le jour du meurtre des deux enfants.


Olivier Proust
"Une réforme pénale devrait intervenir cette année"

Pensez-vous que la justice reconnaît aujourd'hui davantage ses erreurs ?

Je pense que, grâce à la médiatisation de certaines affaires (notamment l'affaire d'Outreau), la Justice est capable aujourd'hui de se remettre en question et de reconnaître ses erreurs. Cela est une avancée importante puisque le procès d'Outreau a abouti à la création d'une commission d'enquête parlementaire qui a proposé des réformes de notre système pénal. Une réforme pénale devrait donc intervenir cette année.


Avez-vous un lien de parenté avec "the" Proust ?

Pas directement mais il semblerait que nous venons de la même région de France. Des recherches généalogiques plus poussées permettraient peut être d'établir un lien...

Je remercie tous les internautes pour leurs questions intéressantes et les invite à poursuivre leur découverte des grandes affaires judiciaires.


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