Livre Pierre Bodein : un procès qui questionne


Antoine Will, enseignant remplaçant en histoire, a été interpellé par l’histoire des vanniers, coaccusés de Pierre Bodein lors du procès devant les assises du Bas-Rhin, en 2007. Photo Dominique Gutekunst
« Il ne s’est rien passé à Artolsheim ». Antoine Will a ainsi titré un livre qu’il a écrit, après avoir suivi le procès en assises de Pierre Bodein et de ses coaccusés issus du milieu vanniers, au printemps 2007, à Strasbourg.

C’est d’abord la curiosité pour un procès « qui a fait beaucoup de bruit », qui a poussé cet enseignant atteignant la trentaine à se rendre chaque jour à l’audience. La comparution de deux familles de vanniers aux côtés de Pierre Bodein pour l’enlèvement, le viol et le meurtre d’une fillette de 10 ans en juin 2004, et l’acquittement de ces vanniers à l’issue d’un procès fleuve de trois mois, avaient soulevé les passions en Alsace.

« Au-delà de l’horreur »

« Il y avait le problème de la culpabilité des vanniers, mais aussi celui de certaines personnes dans le public qui les avaient condamnés d’office. Ce qui m’a également frappé, c’est la difficulté de rendre la justice et le fait que, lors de ce procès, la formule "intime conviction" a pris tout son sens. »
Pour Antoine Will, qui enseigne l’histoire, le procès s’est avéré très intéressant. « Le contexte social des accusés, cette marginalité en milieu rural, est quelque chose qui m’a beaucoup interpellé. Je ne connaissais pas les vanniers avant cette histoire. C’est presque un tabou en Alsace, la façon dont vivent ces gens, dont leur mode de vie se reproduit. Il y avait là tout un contexte qui allait au-delà d’un fait divers banal. »
Le jeune homme s’est interrogé sur la nature des crimes évoqués au procès, sur la folie et la violence qui y sont associées. « Il n’y a pas de mots pour décrire ce que les parents des victimes ont vécu. Il y a quelque chose, dans cette histoire, au-delà de l’horreur. Cela parle des humains, de la difficulté de donner un sens à de tels actes. Cela parle aussi du problème de la vérité, de la société, de la machine judiciaire et de l’incapacité de la prison à changer les choses. »
Au sortir du procès, Antoine Will a senti le besoin d’écrire, mais a essayé d’éviter le pathos. « J’ai tenté de raconter cette histoire de manière objective, distanciée. » Il a pris aussi le parti de modifier les noms des différents protagonistes.
« Je voulais protéger un peu les victimes et les vanniers, que cette histoire ne les poursuive pas dans le temps. »

Source : L'Alsace



« Il ne s’est rien passé à Artolsheim »,

Auteur : Antoine Will

Editions : Al Dante.

200 pages

13.00 €