lundi 6 février 1978 , des policiers se rendent dans la matinée au domicile de Mr Sobon , 26 rue Camille-Desmoulin à Méricourt-sous-Lens .
c'est une petite commune en banlieue de Lens ( Pas-de-Calais ) . ils ont été averti par la voisine , inquiete de voir la porte d'entrée entrouverte et l'absence de reponse au telephone .
les policiers y penetrent et decouvrent une terrible scene de crime
Mme Sobon , 36 ans git au rez-de-chaussée ... elle a recu de nombreux coups , a saigné abondamment et son cou porte une marque de strangulation . A l'etage , les policiers constatent le deces de sa fille unique , Sandrine , agee de 5 ans , etranglée et noyée dans la baignoire .
le mari , Mr Sobon , revient precipitamment de son chantier à Maubeuge . en effet celui-ci est entrepreneur , ce jour la il etait en deplacement avec ses ouvriers .
de suite il livre 2 informations importantes : il manque dans le hall un porte-clés mural en fer forgé .. les clés sont au sol , le meurtrier a certainement utilisé cet accesoire pour etrangler son epouse .
autre element : un jeune ouvrier manque a l'appel . en effet au depart de la camionette à 6H , Jean-luc Riviere manoeuvre maçon recemment embauché etait absent . il constante egalement un vol d'argent dans le domicile ( plus de 500 fr )
voila une piste pour la police !! en debut d'apres-midi les enqueteurs perquisitionnent l'appart de JL Riviere .. ils y trouvent le porte-monnaie de Mme Sobon dans une poubelle .
placé immediatement en GAV , il passe aux aveux : oui j'ai tué mme Sobon , mais la fillette c'est pas moi .. c'est un ami : Mohamed Chara .
c'est un ami de circonstance : l'année precedente ils etaient en stage professionel au CFA de Berck sur mer ( 62 ) . etant originaire tous les 2 du meme secteur ils ont facilement sympathisé . depuis la fin du stage ( nov 77 ) , ils se sont revus 1 ou 2 fois .
Mohamed Chara est interpellé à la sortie d'un bistrot vers 17h40 . au commissariat il nie farouchement le meurtre dont on l'accuse . le lendemain à 13 H il avoue le crime .
l'affaire est close , la presse locale felicte l'enquete rondement menée . cependant les policiers souhaitent donner de la consistance au dossier . certes ils ont les aveux mais rien de plus : pas d'empreintes .. rien .
ils mettent alors un plan de genie : le vendredi 10 fevrier , un dispositif policier fait un barrage devant le domicile des Sobon afin d'interpeller les passants à la meme heure du crime .
l'idee est la suivante : si une personne passe ce jour , peut etre qu'elle y passe quotidiennement ( travail , ecole .. etc ) , et donc elle a certainement passé ce lundi et a vu quelque chose devant le pavillon .
BINGO !! ça marche !! 2 enfants de 7 et 10 ans , se rendant à l'ecole à pieds , affirment avoir vu 2 cyclomoteurs devant la maison .. c'est mince mais c'est un bon debut . les propos sont notifiés dans un PV . le soir meme , les enqueteurs se rendent au domicile des enfants .
le temoignage va prendre une ampleur considerable ; voila que le soir les 2 enfants affirment avoir vu les 2 cyclo et .. de suite la fuite d'un blanc et d'un bougnoul ( terme noté dans le PV ) sur ces memes cyclos .. le bougnoul se debarassant un d'objet metallique avec crochets dans une poubelle . pardi !! c'est l'arme du crime !! le fameux porte clé mural qui a servi a etranglé la jeune femme .
voila !! le dossier est musclé !! ( nous aurons l'occasion de discuter sur d'autres éléments du PV )
23 juin 1980 , le proces s'ouvre à la cour d'assise de Saint-omer ... il est ajourné le 25 juin pour complement d'information ( temoin tardif et la presidente du tribunal juge le dossier mal ficellé )
le proces reprends le 14 octobre , le 18 les jurés condamnent Chara et Rivière à la peine capitale .
quelques mois plus tard le verdict est cassé par la cour de cassation : il manque la mention " à la majorité de huits voix au moins " dans la réponse d'une question .
automne 1981 la peine de mort est abolie ...
Fevrier 1982 : le dernier proces à Amiens condamne definitivement les 2 accusés : la prison à perpetuité . Chara purge sa peine à la prison de Toul .
il ne cessera ce clamer son innoncence .. il n'a pas tué la gamine , il n'etait pas sur les lieux du crime . mais qui va entendre ses cris au dela des murs epais d'une maison d'arret ?? personne .
Mohamed Chara victime d'une erreur judiciaire ?? allons donc , quelle idée !! l'accusation dispose des aveux du suspect .. et de 2 témoins . ET POURTANT !!
le destin va tendre une perche à Chara .. en 1990 il est en prison depuis 12 ans . cette meme année 2 journalistes penetrent dans l'enceinte de la prison de Toul afin de preparer un documentaire audiovisuel pour l'emission " justice en France " de la chaine La Cinq .
un jour , en fin d'apres midi , un jeune homme les interpelle : je m'appelle Mohamed Chara , j'ai été condamné a mort par la cour d'assise de saint-omer , proces cassé , rejugé en 82 j'ai pris perpetuité ( peine de mort abolie ) .
on m'accuse du meurtre d'une fillette de 5 ans , je clame mon innoncence depuis , mais personne ne m'ecoute . vous etes mon dernier espoir .
les 2 journalistes sont ebranlés . ils ont devant eux un individu qui aurait du avoir le cou tranché par la guillotine suite à une decision de justice .
selon eux , il est impossible que la justice condamne aussi lourdement sans un dossier beton . Chara doit etre coupable . Neanmoins, troublés par la requete , les 2 journalistes decident d'un commun accord de se plonger dans une nouvelle enquete .
ce qu'ils vont decouvrir depasse leur imagination ... pas de mots pour decrire leur stupefaction . ils epluchent le dossier penal et interrogent differents temoins : le dossier est truffé d'INCOHERENCES !!! ( souvenez vous ; la presidente du tribunal qui remarque un dossier mal ficelé .. c'est peu dire ) . la certitude fait place au doute ; Chara est innoncent . en 1991 ils decident de presenter leur contre-enquete dans une emission speciale .
la date n'est pas choisi au hasard : le doc est difusé le 9 oct 1991 .. le jour du 10 eme anniversaire de l'abolition de la peine de mort . le 27 dec 91 une demande de revision est presenté .. Mohamed Chara decede 2 jours plus tard d'un arret cardiaque .
il etait devenu diabetique lors de sa detention . la cour de revision rejette la demande en janvier 1995 . a ce jour Chara est , aux yeux de la justice , tjs le meurtrier de la petite Sandrine Sobon .
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