L'apologie de la maigreur va devenir un délit :
Entre 30 000 et 40 000 personnes souffrent en France d'anorexie
L'anorexie est une maladie qui conduit bien souvent à la mort. En France, 30 à 40000 personnes, majoritairement des jeunes filles et des femmes, seraient concernées.
"Deux ans d'emprisonnement et 30 000 d'amende", c'est ce que vont encourir ceux qui encouragent la maigreur excessive, "trois ans d'emprisonnement et 45 000€ d'amende" lorsque la démarche aura entraîné la mort.
C'est du moins ce que prévoit un texte visant à combattre l'incitation à l'anorexie qui sera discuté la semaine prochaine à l'Assemblée nationale. "C'est la première fois que l'on parlera d'anorexie dans l'hémicycle", se félicite Valérie Boyer, la députée des Bouches-du-Rhône qui présente cette proposition de loi. Mais ce texte sera évoqué dès aujourd'hui au ministère de la Santé où les professionnels de la mode signent une charte par laquelle ils s'engagent à "éviter les stéréotypes qui favorisent la constitution d'un modèle esthétique", "protéger la santé des mannequins" et "faire prendre conscience au grand public des dangers de l'anorexie".
Une charte, une loi, simple hasard ? "Les deux textes s'inscrivent dans un processus global contenu dans le plan santé pour les 16-25 ans présenté en février par Roselyne Bachelot", explique Valérie Boyer.
À l'automne 2006, les pouvoirs publics avaient été alertés par une série d'affaires dramatiques comme la mort d'un mannequin brésilien. La jeune femme qui ne se nourrissait plus qu'avec des pommes, pesait 40kg pour 1,75 m. Mais surtout, les images d'une jeune comédienne marseillaise, photographiée avec un art consommé de la provocation par Oliviero Toscani, le concepteur des pubs Benetton, affichaient sur tous les murs une nudité cadavérique et choquante.
Ces photos bouleversantes alimentaient aussitôt les sites "pro-ana" qui font l'apologie de l'anorexie. Hier encore, Valérie Boyer réfléchissait à la manière d'introduire dans la loi la possibilité de faire fermer ces sites pourvoyeurs d'images insoutenables "qui peuvent fasciner des adolescentes à la recherche des limites et pour qui la maigreur devient un jeu morbide", explique le Dr Éric Bazin, pédopsychiatre dans un centre médico-psycho-pédagogique à Marseille.
"Chez d'autres, qui ont un terrain psycho-pathologique favorable et qui comme toutes les adolescentes sont influençables, des images de jeunes femmes filiformes peuvent favoriser des conduites d'anorexie mentale", ajoute-t-il.
Selon Valérie Boyer 30 à 40 000 personnes sont touchées en France par l'anorexie. Le taux de mortalité est évalué à 5,6% à dix ans et le risque de décéder par suicide est multiplié par 22. Mais une sensibilisation au problème aussi efficace soit-elle peut-elle conduire la presse féminine, les couturiers et les créateurs à choisir des modèles plus en chair ? Oui, répond Lola qui avec une autre styliste, Chloé, a créé il y a un an la marque "Les Dilettantes".
"C'est en arpentant les rues de Marseille que nous avons trouvé Justine, une étudiante qui pose pour la collection été 2008. Nous ne voulions pas passer par une agence. Nous voulions quelqu'un comme tout le monde pour que nos clientes, des femmes actives de 20 à 35 ans, puissent mieux s'identifier". Et à croire Lola, le mouvement, même imperceptible, serait enclenché. "Feuilletez la presse féminine. C'est l'époque du spécial minceur. Mais quand on lit bien, on nous dit surtout ne faites plus de régimes !"
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"Aucune loi ne peut obliger à grossir"
Le témoignage d'Isabelle Caro, 26 ans, comédienne marseillaise qui avait posée nue pour Oliviero Toscani.
La promotion de la "diversité corporelle", la communication sur les "dangers de l'anorexie"... Instinctivement, Isabelle Caro est touchée par ces projets malgré la froideur du libellé. Cette jeune comédienne marseillaise avait choisi, l'automne dernier, de laisser le photographe italien Oliviero Toscani mettre son anorexie en scène. Les clichés ont fait scandale.
Isabelle s'est une fois de plus interrogée, parfois sur des plateaux de télé, sur sa maladie. Sur cette relation tendue avec les aliments. Des mois plus tard, elle va mieux,assidue au cours Florent, à l'aise dans un corps qu'elle a réussi, à force de repas fractionnés et de persévérance, à fortifier: "Je pesais 32 kg en octobre dernier, je suis arrivée à 37 kg. Je me sens mieux, j'ai plus de force et je peux faire plus de choses, être active. Je suis toujours suivie, par mon médecin à Marseille et à Paris, à l'hôpital Georges-Pompidou".
Une loi dont les objectifs seraient de "combattre les incitations à l'anorexie", Isabelle trouve l'idée "plutôt bonne". Mais elle sait aussi que le problème est plus profond. Qu'on ne peut pas le limiter à l'influence de l'image sur le mental des jeunes gens : "Bien sûr, la mode, les photos de filles ultra fines confortent les anorexiques dans leur idée, dans leur projet, d'être toujours plus minces. Mais ce n'est pas tout". Il y a aussi cette spirale dans laquelle on s'enferme seul. Cette bataille menée contre son propre corps. Et nombre de mentalités à faire évoluer, faut-il une loi pour ça ?
Il y a quelques jours, Isabelle Caro était membre d'un jury dans un casting de candidats au mannequinat. "J'ai parlé à de très jeunes gens de la nécessité d'être en forme pour aborder les métiers de la mode. Une fille de 17 ans avait perdu 9 kg pour participer à ce concours. Je l'ai encouragée à consulter un médecin. Elle était très attentive à mes conseils jusqu'à ce que le créateur qui prêtait ses vêtements pour le défilé lui dise : 'Il faut perdre des hanches, éliminer 5kg'. Il m'a dit en aparté : 'Si elle ne le fait pas, elle ne travaillera pas'... Aucune loi ne peut obliger quiconque à grossir, ce serait n'importe quoi. En revanche, il faut multiplier les contrôles médicaux des jeunes mannequins par exemple. Seul un médecin peut évaluer leur état général, repérer leurs carences".
Par Dominique Arnoult et Olga Bibiloni _________________ "C'est parce que la vitesse de la lumière est supérieure à celle du son, que certains paraissent brillants avant d'avoir l'air con".
Comment se fait-il que certains paraissent si cons même sans lumière ? C'est de la métaphysique pure.
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