Le surplomb de l'établissement par des immeubles faciliterait la tâche d'un tireur chargé - comme à Varces dimanche dernier - d'assassiner un détenu
La prison de Nice exposée au nouveau risque de « sniper »
Photo : François Vignola
De certains balcons la vue est imprenable sur la prison de Nice.
Sans précédent dans les annales pénitentiaires, le scénario a de quoi inquiéter les responsables de la prison de Nice. Dimanche après-midi, un pensionnaire de la maison d'arrêt de Varces-Grenoble (Isère) a été assassiné par un snipper posté à l'extérieur. Arrêté peu après, le présumé tireur aurait atteint sa victime d'une distance de 200 à 300 mètres, en faisant feu à cinq reprises d'une colline surplombant l'établissement.
De mémoire de surveillant ou de magistrat, jamais tel guet-apens n'avait été osé. Sa réalisation alarme d'autant plus qu'elle pourrait être réitérée ailleurs. Et en premier lieu à la prison de Nice, un bâtiment centenaire, entouré par des immeubles d'habitation. De certaines terrasses ou toitures, la vue plonge sur les cours de promenades des détenus. Et la distance est si réduite que des riverains louèrent leurs balcons à des paparazzi, afin de permettre à ces chasseurs d'images de prendre des photos volées d'une ex-vedette du show-biz incarcérée un temps dans une affaire d'escroquerie. Et si demain, un fusil à lunettes remplaçait le téléobjectif ?
« Le risque concerne la cour de promenade des femmes, servant de terrain de sport pour les deux sexes », précise Johann Bataillé, secrétaire du syndicat majoritaire à Nice, l'Union fédérale autonome pénitentiaire (UFAP). « La cour de promenade des hommes est couverte par un épais grillage ne laissant filtrer que des ombres et des silhouettes ».
À Varces, le probable relais d'un téléphone portable renforce les craintes de l'UFAP. « Par ce biais, un complice a sans doute informé le tireur des mouvements de la victime. À Nice l'an dernier, une surveillante a subi des représailles - l'incendie de sa voiture - quelques heures après avoir envoyé un détenu irascible en quartier disciplinaire. Là encore, l'information a transité par un mobile ».
Que faire en Baie des Anges pour décourager un éventuel sniper ? « Pas grand-chose, je le crains », répond le procureur Éric de Montgolfier. « Tant il paraît difficile de se protéger contre un risque qui, dans une moindre mesure, concerne de nombreuses prisons. Pour l'exclure totalement, il faudrait construire les établissements sur un plateau, sans rien autour. »
Grasse : danger moindre mais pas nul
Ainsi à la prison de Grasse, édifiée à flanc de colline, le danger n'est pas nul (1). D'une butte dominant le mur d'enceinte, il est possible de voir la cour de promenade et le terrain de sport.
Le syndicat Force Ouvrière va soulever le problème. Sans se faire trop d'illusions sur les solutions susceptibles d'être mises en oeuvre. « On nous demandera d'être plus vigilants, de redoubler d'attention dans les miradors », avance le délégué FO, Laurent Marino.
La garde des Sceaux s'est déplacée dimanche à Varces pour annoncer un renforcement de la sécurité. Se penchera-t-elle sur les cas de Grasse et surtout de Nice où une prison neuve est promise et attendue depuis des années ?
« Après les évasions par hélicoptère, le ministère doit faire face à une nouvelle menace. La vulnérabilité de chaque téablissement sera étudiée » a laconiquement indiqué hier soir une porte-parole de la Chancellerie. Avec quelles consequences pour les A.-M. ? « Ce qui s'est passé dimanche est grave. » souligne une magistrate niçoise « La réponse de l'Etat ne peut concerner la seule maison d'arrêt de Varces ».
1. Contactés, les directeurs des prisons de Nice et de Grasse n'ont pas souhaité répondre à nos questions, sans l'aval de leur hiérarchie, impossible à obtenir en quelques heures.
Source : Nice Matin
