En 1968, "Paris-Match qualifiait Fleury-Mérogis de 5-étoiles"
La prison de Fleury-Mérogis filmée clandestinement par des détenus
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Reportage La prison de Fleury-Mérogis filmée de l'intérieur
En 1968, "Paris-Match qualifiait Fleury-Mérogis de 5-étoiles"
Comment la maison d'arrêt de Fleury-Mérogis a-t-elle été conçue ?
Le Monde.fr a diffusé, jeudi, une vidéo montrant les conditions de vie des prisonniers de Fleury-Mérogis. L'un de vos proches – ou vous-même – a été incarcéré. Hygiène, surpopulation, accès aux soins... A quoi ressemble le quotidien d'un prisonnier ?
La maison d'arrêt a été inauguré en 1968 dans une période où on construisait de très nombreuses opérations de logements sociaux. C'était une époque où l'on érigeait des constructions très importantes, de grande dimension. De la même façon qu'on inaugurait des grands ensembles d'habitation de 4 000 logements, on trouvait logique de concevoir une prison gigantesque avec 3 200 cellules.
La méthode de conception est, elle aussi, significative de cette période : pour des raisons économiques et d'efficacité, les travaux suivaient un process industriel avec le recours à des coffrages-tunnels, des sortes de caissons métalliques, autour desquels on coulait du béton. Fleury-Mérogis a ainsi été construite en quarante et un mois. Mais comme on ne maîtrisait pas encore parfaitement ce matériau, le résultat s'est révélé très médiocre avec des performances techniques très limitées. Quinze ou vingt ans plus tard, le béton de la maison d'arrêt a commencé à se dégrader en profondeur.
Fleury-Mérogis devait servir de modèle pour les prisons françaises ?
Tout à fait. Fleury-Mérogis marque une étape capitale, puisqu'on pousse la logique de géométrie et d'efficacité spatiale jusqu'à son paroxysme, en y ajoutant l'automatisation d'une partie des fonctions de la prison. C'est perçu comme un pas en avant même si, dans l'esprit, on se situe dans la logique, déjà ancienne, qui remonte à la fin du XVIIIe siècle, du panoptique. L'idée, classique pour les prisons, est d'organiser la surveillance autour d'un point central qui permette de visualiser l'ensemble des cellules, sur 360 degrés.
Fleury-Mérogis se caractérise par l'existence d'un panoptique dans le panoptique puisque les tripales [bâtiments à trois branches] qui abritent les prisonniers s'organisent autour d'une rotonde centrale. A l'époque, Paris-Match qualifie Fleury-Mérogis de 5-étoiles. L'inauguration ne passe d'ailleurs pas très bien dans l'opinion publique qui ne comprend pas forcément qu'on loge les détenus comme les classes moyennes.
Pourquoi la situation s'est-elle autant dégradée ?
Très rapidement, l'administration pénitentiaire s'est rendu compte qu'elle avait généré un monstre. Elle n'a d'ailleurs plus construit de prisons de cette taille. Humainement, Fleury-Mérogis est invivable dans la mesure où, parfaitement géométrique, elle n'offre aucune possibilité de rupture, de désordre et très peu d'activités. Ajoutez à cela la surpopulation et l'insalubrité et vous avez le résultat actuel. Et comme les bâtiments sont conçus en un seul bloc, les rénovations se révèlent complexes et très coûteuses.
Source : Le Monde