Citation :
Juste une question : pourquoi CR aurait parlé à quelqu'un (et donc pris le risque que ce même quelqu'un lui réponde), tout celà en sachant que les Aubert étaient là aussi, et pouvaient entendre ? CR était supposé être seul à ce moment là, quand il est monté sur le talus. Surtout devant des témoins.
Bref, c'était un risque de parler à d'autres que les Aubert.
Chris2701, vous connaissez les lieux aussi bien que moi. Vous connaissez donc la qualité de l’acoustique entre la route où les deux voitures se sont arrêtées et les fourrés dans lesquels a été trouvé le corps de cette malheureuse fillette.
Vous me confirmerez que le scénario suivant est possible :
1. Le ravisseur et l’enfant se trouvent à l’arrière de la voiture, Ranucci conduit.
2. L’accident de la Pomme survient, suivi de la fuite de Ranucci.
3. L’aile endommagée frotte sur le pneumatique et fait un bruit d’enfer. Le pneumatique ne tarde pas à sentir le brûlé.
4. Nos comparses s’arrêtent dès qu’ils peuvent, dès qu’ils sont certains d’être hors de vue des Martinez.
5. Ranucci sort de la voiture pour effectuer une réparation de fortune (redresser l’aile qui frotte contre la roue). Le ravisseur et la fillette restent dans la voiture, à l’arrière.
6. Ils entendent un véhicule qui s’approche. Ils pensent tout d’abord qu’il ne s’agit que d’un simple automobiliste qui circule sur cette route, sans nécessairement que cet automobiliste soit à leur poursuite.
7. Par prudence, Ranucci quitte sa position à gauche de la voiture et grimpe dans les fourrés, le temps de laisser passer l’importun. Le ravisseur et la fillette restent dans la voiture, à l’arrière. Ranucci ne sera jamais vu par les Aubert.
8. Contre toute attente, au lieu de passer son chemin, l’automobiliste importun se met à ralentir. Il devient évident qu’il compte s’arrêter au niveau de la Peugeot.
9. Le ravisseur n’a d’autre choix que de se mettre lui aussi à l’abri. Il sort par la gauche au nez et à la barbe des Aubert, contourne la voiture, ouvre la portière droite, extirpe l’enfant de sa position entre la banquette arrière et les sièges avants et s’enfuit dans les fourrés en tirant la fillette par le bras.
10. Le ravisseur dépasse Ranucci qui est resté à son poste d’observation, juste hors de vue des Aubert, qui sont restés sur la route. Le ravisseur et l’enfant continuent à s’éloigner dans la garrigue.
11. Au moment où Ranucci est dépassé par le ravisseur et l’enfant, Ranucci, désorienté, ne peut s’empêcher de lui demander « Et maintenant, qu’est-ce qu’on fait ? », d’une voix la plus douce possible en essayant de ne pas se faire entendre des Aubert.
12. Le ravisseur, qui continue de s’éloigner, soit par gestes soit à voix basse, intime l’ordre à Ranucci de retenir les Aubert pendant que lui continue de s’enfuir avec l’enfant.
13. Les Aubert se sont arrêtés. Ils ont entendu Ranucci s’adresser au ravisseur. Logiquement, ils attribuent cette voix à la fillette. [Ils n’ont en effet vu qu’un homme et un enfant et leur esprit, inconsciemment, élimine l’hypothèse absurde que ce soit l’adulte qui interroge la fillette sur la suite à donner aux événements]. Monsieur Aubert appelle en direction de la voix qu’il vient d’entendre et du bruit des branchages. « Revenez, n’aggravez pas votre cas, il n’y a que des dégâts matériels … ».
14. Ranucci s’adresse alors aux Aubert. Il a changé de voix, parce qu’il ne s’adresse plus au ravisseur en chuchotant et le visage tourné vers la forêt, mais aux Aubert en parlant haut et clair en leur direction. « Oui, attendez, je vais venir ». Le but est de gagner du temps pour permettre au ravisseur de filer.
15. Ranucci serait certainement redescendu vers la route pour inventer une histoire aux Aubert (voire de remplir un constat à l’amiable) si les Aubert avaient fait mine de le rejoindre dans les fourrés. Il prépare déjà sa réponse au cas où les Aubert lui parlent de la fillette. Il hésite entre « Un enfant ? Quel enfant ? » et « Ma fille devait faire pipi. Elle est partie se soulager dans les bois ».
16. Contre toute attente, les Aubert ne s’attardent pas sur les lieux et ne menacent pas de grimper dans les fourrés pour rejoindre Ranucci. Les Aubert notent ostensiblement le numéro minéralogique de la voiture de Ranucci et s’adressent tout ostensiblement et clairement l’un à l’autre : « Allons-nous en, Aline, ce type ne perd rien pour attendre. J’ai pris son numéro, allons immédiatement à la gendarmerie ».
17. Les Aubert reprennent leur voiture et s’éloignent.
18. Le ravisseur et l’enfant rejoignent Ranucci. Dès cet instant, ils savent que la voiture de Ranucci a été identifiée, que l’enfant a été aperçue par des témoins et que les gendarmes ne vont pas tarder à rappliquer. Si l’enfant vit, elle sera immanquablement mise en présence de Ranucci un jour ou l’autre. Le ravisseur ne tardera pas à être identifié lui aussi. Le conciliabule est bref ; il n’y a pas d’autre solution : il faut se débarrasser de la petite. Le ravisseur s’en charge pendant que Ranucci va mettre la voiture à l’abri des regards.