Citation :
Le problème c'est que maintenant il semble assez clair :
Qu'en fouillant le garage, les enquêteurs ont aperçu le pantalon bleu foncé qui traînait sur le vélomoteur, les quelques traces de sang et de terre, mais qu'ils n'ont pas pensé à le saisir.
Qu'au milieu de la nuit, lors de la garde-à-vue, ils ont mis en route le pantalon comme l'un des rares éléments matériels qu'ils possédaient en essayant de prétendre : 1/ qu'il était déjà saisi et qu'il provenait de la voiture 2/ que le sang était celui de l'enfant.
Qu'aprés les aveux, ils ont inscrit le pantalon : 1/ sur le pv de fouille par un rajout 2/ sur la liste des objets saisis (avec le couteau...) alors qu'il n'était justement pas encore saisi...
Qu'ils ont rendu la voiture à Mme Mathon peut-être avec cette intention d'aller la rechercher et d'avoir ainsi accès au garage sans éveiller les soupçons. Sinon pourquoi être si pressé de la rendre ?
Qu'ils sont revenus au garage et qu'ils l'ont ouvert avec la clé de Christian Ranucci pour reprendre le pantalon bleu foncé qu'ils avaient oublié.
Qu'ils ont ramené le tout à Marseille et qu'ils ont envoyé un inspecteur faire semblant de saisir la voiture pour qu'on ne puisse pas penser que la voiture avait été saisie dans des conditions illégales.
Je crois que le scénario ne variera plus beaucoup.
Assez clair pour qui ?
Non, je suis désolé mais ça ne tient pas debout.
Déjà le pantalon saisi dans le garage c'est pas évident. En fait de garage, celui de Ranucci était plutôt un garage collectif, c'est à dire un parking couvert dont l'accès était fermé, comme il s'en trouve au sous-sol de nombreuses résidences. Il y a des photos qui ont été diffusées dans la presse du garage de Ranucci (je ne les ai pas moi-même mais je les ai vues). Il n'y a pas de portes de garages individuelles, on voit d'ailleurs d'autres autos dans ce parking. Sur les photos où l'on voit la voiture de Ranucci, on voit qu'à son emplacement, il n'y a rien d'autre qu'une voiture entre des murs nus. Il est peu probable dans ces conditions qu'il y ait eu quoique ce fut à perquisitionner dans ce garage, à part le contenu de la voiture elle-même (vous laisseriez traîner vos affaires à la vue de tout le monde alors que vous pouvez les mettre dans votre coffre ? vous voyez souvent des gens qui rangent leurs affaires à côté de leur voiture sur des places de parking ?). Peut-être que du temps où il n'avait qu'une mob, le pantalon restait à trainer dans un coin ou sur la mob faute de mieux, après... ça ne me semble pas illogique qu'il se soit retrouvé dans le coffre. Et puis quel intérêt de dire qu'un pantalon a été saisi dans un coffre si on l'a trouvé dans le garage ? A partir du moment où Ranucci reconnait l'avoir porté le jour de l'accident, je ne vois pas trop.
Ensuite, c'est du délire.
Les policiers se rendent chez quelqu'un qui est soupçonné d'un meutre sanglant et qui a séjourné dans une galerie boueuse. Ils se rendent dans son garage et ils trouvent un pantalon tâché de sang et de boue. Et ils ne le saisissent pas !. Non, ils préfèrent saisir les scoubidous, ça leur frappe davantage l'esprit !. Franchement, qui va croire ça ? C'est du même tonneau que les gendarmes découvrant l'arme du crime sous 20 cm de tourbe sans appareil de détection pour finalement décider de le laisser sur place et attendre le lendemain pour se ballader deux heures dans les bois avec leur poelle à frire. C'est somnambulique.
Et quelques heures après, donc, les policiers parlent à Ranucci du pantalon, se rappelant soudain que "bon sang mais c'est bien sûr"... le pantalon tâché de sang auquel on a pas fait gaffe, c'est celui du crime ! Un peu longue à la détente la police ! Ah ben zut, on l'a oublié là bas...
Et donc, plutôt que de faire dire à Ranucci "je portais un pantalon bleu qui se trouve dans mon garage" ils lui font dire "le pantalon que vous avez saisi dans mon coffre en ma présence..." alors qu'il ne l'ont pas saisi en sa présence et encore moins dans son coffre !. Et Ranucci ça ne le frappe pas plus que ça une énormité pareille. A tel point qu'il ne remettra jamais en question le fait que ce pantalon a été saisi dans son coffre, non plus qu'il le portait lors de l'accident. Coopératif, le gars.
Et les policiers qu'on est si prompt à accuser de forfaiture et qui auraient eu l'occasion rêvé d'avoir un élément qui circonstanciait les aveux en allant récupérer le pantalon le lendemain et en "découvrant" qu'il était tâché de sang, et bien non, ils préfèrent lui faire dire qu'il est déjà saisi, se mettant eux-mêmes tout seuls dans la mouise !
Et le lendemain, il y a une perquisition au domicile, où justement on pose des questions sur le linge de Ranucci (c'est probablement à cette occasion d'ailleurs qu'on parle du pantalon saisi la veille à Mme Mathon) mais il ne saisissent toujours pas le pantalon ! Ils préfèrent attendre car ils sont tordus. Ils préfèrent les perquises illégales qui ne s'imposent pas plutôt que de faire les choses dans les formes. Ils attendent jusqu'au dimanche 9, mais comme ils sont tordus et qu'ils tiennent à ce que ça se sache, plutôt que de prendre simplement le pantalon, ils embarquent la voiture avec ! Bien sûr. Très crédible.
Entre temps, Ranucci est passé devant la juge d'instruction qui lui pose des questions sur le pantalon. Alors que le pantalon ne se trouve pas dans son dossier puisqu'il n'a pas encore été saisi. Mais ça ne la frappe pas non plus. Elle le transmet pour analyse un pantalon qui n'existe pas sans que ça l'inquiète. Elle ne verra que le pantalon que le 10 : "Ah tiens, Mme la Juge, on avait oublié de vous mettre une preuve accablante dans le dossier ! par contre il faudrait rajouter une ligne sur le PV de saisie du 5..." OK, ça roule ! Et il a fallu falsifier également le scellé du pantalon je suppose. C'est drôle, on en parle jamais. On parle toujours du PV récapitulant les saisies mais jamais de la saisie elle même. Serait-elle régulière par hasard ? Avec un numéro d'ordre et un numéro de scellé qui colle avec une découverte le 5 dans un coffre ? Mystère.
Et pour finir, Ranucci dit au procès : je portais le pantalon le jour du crime mais le sang vient du fait que j'ai saigné lors de l'accident. Faut toujours qu'il s'entête à dire des trucs qui vont contre son innocence celui-là !
Donc, voilà. A mon avis avec des arguments comme ceux-là c'est pas gagné pour convaincre une cour de révision. Et je dirais même qu'à force de voir à toutes faim des machinations tordues, toutes ces théories du complot à deux balles qui ne tiennent pas la route une seule seconde, ça finit par desservir une hypothèse (l'innocence de Ranucci) qui mérite qu'on s'y penche.
S'il y a un truc qui cloche à propos de ce pantalon, c'est bien le fait que Ranucci l'ait gardé avec lui (je veux bien que les meurtriers fassent des erreurs, mais là c'est énorme !) . Même innocent, il peut très bien l'avoir porté le jour de l'accident avoir marché dans la boue avec. Il fallait bien qu'il porte quelque chose quand il était dans la galerie à bricoler sa voiture, avant de se présenter tout propre devant les Rahout. Et le sang qui est dessus ça peut aussi être le sien. C'est curieux, c'est pas de bol d'avoir du sang sur son pantalon à 1200 mètres d'un crime de sang dont on est accusé, mais c'est pas vraiment accablant non plus.