J'ai trouvé ce qui concerne le faux sur un site concernant les élus locaux :
"Rappelons que le code pénal prévoit dans son article 441-1 que « constitue un faux toute altération frauduleuse de la vérité, de nature à causer un préjudice
, et accomplie par quelque moyen que ce soit, dans un écrit, ou tout autre support d'expression de la pensée qui a pour objet ou qui peut avoir pour effet d'établir la preuve d'un droit ou d'un fait ayant des conséquences juridiques.
Le faux et l'usage de faux sont punis de trois ans d'emprisonnement et de 300 000 F d'amende » (soit environ 45 734,71 €).
Ces sanctions sont plus sévères encore lorsqu'il s'agit de faux commis dans une écriture publique ou dans un acte authentique. Ainsi, l'article 444-4 du code pénal prévoit-il : « le faux commis dans une écriture publique ou authentique ou dans un enregistrement ordonné par l'autorité publique est puni de dix ans d'emprisonnement et de 1 000 000 F d'amende (environ 152 449,01 €).
L'usage du faux mentionné à l'alinéa qui précède est puni des mêmes peines.
Les peines sont portées à quinze ans de réclusion criminelle et à 1 500 000 F d'amende (environ 228 673,53€) lorsque le faux ou l'usage de faux est commis par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public agissant dans l'exercice de ses fonctions ou de sa mission ».
Donc je ne poserais pas la question suivant des termes tout à fait identiques. La question n'est pas de savoir si Ranucci reconnaît ou non que le pantalon a été saisi dans le coffre de sa voiture, la question est de savoir si le rajout sur le PV, qui est constitué, de la mention : "un pantalon de couleur sombre" est :
1/ une altération frauduleuse de la réalité
2/ si elle cause ou non un préjudice à Ranucci.
Le raisonnement que je lis consiste à dire : Ranucci dit lui-même que le pantalon a été saisi dans le coffre, et par la suite ne le conteste jamais, ainsi donc le rajout ne constitue pas une altération frauduleuse de la réalité, donc ce n'est pas un faux.
Juridiquement, le raisonnement peut paraître imparable.
Là où nous sommes un peu géné aux entournures, c'est qu'on ne peut en l'espèce se référer qu'à la parole de Ranucci. Et que Ranucci dit souvent n'importe quoi et ne se souvient pas de la moitié des choses.
Pour exemple, il va dire dans le cabinet du juge à propos du témoignage Spinek qu'il était en Belgique, confondant l'année 1974 et l'année 1973. En fait il était en Allemagne. S'il est capable d'oublier où il était à quatre mois de décalage, oublier a fortiori qu'il était à l'armée, il est capable d'oublier s'il avait mis ou non un pantalon taché de sang dans sa voiture.
On ne peut se référer qu'à cette parole fort incertaine parce que l'interrogatoire de garde-à-vue, lorsque Ranucci nie avoir été à la Pomme, est rédigé d'une telle façon que l'on comprend que les policiers certes, lui parlent du pantalon, mais qu'il ne lui montrent pas, alors qu'il était impérieux de le faire puisque Ranucci prétendait contre tout bon sens que le pantalon ne recélait que de la boue.
Il suffisait de le lui présenter pour le convaincre du contraire, or les policiers à ce moment là ne le font pas si l'on suit le PV.
Donc on ne montre pas le pantalon, et ce pantalon ne sera remis aux expert que le 11 juin 1974.
Donc la question est de savoir si en vérité Ranucci était bien en mesure de reconnaître que le fait de saisir au moment de l'établissement du PV un pantalon dans le coffre de sa voiture était vrai et correspondait à la réalité.
Une question est sous-jacente, le pantalon à quoi a-t-il servi ? Il a servi a accuser Ranucci d'avoir commis un meurtre vêtu de ce pantalon ce dont attestait la présence de taches de sang.
Quel préjudice et quelle altération de la réalité pourraient porter ce rajout ?
Le fait qu'en vérité le pantalon n'avait pas été saisi dans le coffre de la voiture et subséquemment n'avait peut-être pas été porté par Ranucci lors du crime.
Or le fait même de ce rajout entraîne un doute sur ce point, et ce doute ne peut pas être levé, ce que la commission de révision veut bien reconnaître : on ne sait quand ce rajout a été effectué, dit-elle dans ses attendus. On peut cependant en avoir une idée puisque ledit rajout est fait par quelqu'un d'autre que l'OPJ qui a rédigé le PV, ce qui donne une indication : si ce n'est pas la même personne, alors c'est que le rajout est postérieur à l'arrivée à Marseille.
Le problème, c'est en réalité que le pantalon est en quelque sorte déconnecté du reste.
Par exemple les aveux ne mentionnent pas, alors qu'ils sont censés être précis et circonstanciés, un quelconque changement de pantalon.
Or que Ranucci ait dormi dans sa voiture à Salernes, ou qu'il ait passé la nuit dans les bars, le fait est qu'il ne peut pas s'être changé avant l'accident.
Mais nous n'avons aucun indice qui nous permet de conclure avec certitude que Ranucci est parti avec un pantalon bleu. Au contraire, Mme Mathon nous parle d'un pantalon gris anthracite et d'un pantalon beige qui est placé dans le sac.
Or les témoins qui aperçoivent Ranucci lorsqu'il vient demander de l'aide pour sortir du tunnel semblent nous dire qu'il portait un pantalon gris.
Ainsi donc nous sommes portés à croire que le pantalon que porte Ranucci à ce moment là est le même que celui qu'il portait la veille et qu'en réalité, il n'a jamais changé de pantalon, comme il s'en déduit à la lecture des aveux.
Ensuite, il apparaît que ledit pantalon n'est jamais présenté à Ranucci, qu'ainsi donc il n'est pas réellement placé dans une position sûre de reconnaître que c'est ce pantalon qu'il portait à ce moment là puisque la question ne lui est pas véritablement posée sur le fait qu'il aurait changé de pantalon et qu'il serait parti de Nice vêtu de ce pantalon. Et que de surcroit, ce fait n'est pas vérifié auprès de témoins divers.
Or donc, il faut conclure que le rajout de la mention : "un pantalon de couleur sombre" est tout à fait susceptible d'avoir altéré la réalité des faits et qu'elle porte un préjudice extrêmement grave à Ranucci puisqu'il encourt la peine capitale.
Et qu'ainsi le faux et bel et bien constitué. A moins que l'on démontre d'une autre façon que le pantalon a bel et bien été saisi dans le coffre ce qui me semble en l'état, impossible.
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