Citation :
Philippe, vous critiquez mes certitudes. Mais je vois que vous en avez aussi. D'après vous, Ranucci sait que les Aubert l'ont vu. Et bien non, Ranucci ne se souvient pas de ce qui s'est passé car son cerveau a explosé à ce moment là et n'a pas perçu ce qui se passait dans son environnement. C'est fréquent dans toutes ces affaires de crime provoquées par une forte montée de tension. Lorsque les auteurs sont interrogés, ils disent tous: je ne me souviens pas, j'étais dans un état second.
Il raconte ce dont il se souvient, comment il a sauté le fossé, comment il est monté dans les fourrés, la fillette qui a crié. Il ne se souvient pas avoir donné des coups avec une pierre et avoir répondu à M.AUBERT.
Je sais ce que vous allez répondre : mon explication est débile. Etudiez d'autres cas de meurtres avant de répondre ça.
Non, Gérard, ce n'est pas débile, mais ça peut se discuter ; d'abord" ils disent tous : je ne me souviens pas, j'étais dans un état second" ; c'est vrai ça, mais je suis certain que pour beaucoup c'est un mensonge : soit stratégique, pour amadouer, "ce n'est pas de ma faute, c'est plus fort que moi, je dois être soigné " ; soit à double sens : "je ne suis pas responsable" : pour ceux qui jugent, ou bien pour sa propre conscience ; et puis c'est le refus d'être le monstre sans nom ; ce n'est pas possible ; ce n'est pas moi ; c'est une étrangeté incrustée en moi la coupable... ;
la montée de tension qui provoque le trou noir "le raptus criminel" comme vous dites, a bon dos dans nombre d'affaires ;
donc pourquoi pas néanmoins, mais ce n'est qu'une hypothèse parmi d'autres ;
mais surtout, "l'état second" des criminels, d'accord ; sauf que généralement, ils ne sont pas interpellés par l'extèrieur quelques secondes avant leur forfait ; car l'appel des Aubert, dans ce moment irréel , c'est une sonnerie de réalité ; on peut parler d'état second quand un criminel est isolé, sur d'agir sans témoin ; il peut alors laisser son inconscient prendre le dessus, supprimer momentanément les précautions ; pour se permettre de "perdre la tête", un criminel psychopate prépare le terrain ; en d'autres termes, ce n'est pas parce qu'un criminel ne se souvient de rien , ne se contrôle plus, qu'il commet son meutre sans préméditation ; il n' y a qu'a voir "M le Maudit" de Fritz Lang.
Alors vous me parlerez de l'affolement de l'accident : mais que le ravisseur soit Ranucci ou pas, je suis certain que MD aurait été assassinée..le coup de "je l'ai emmenée faire un tour juste comme ça, sans savoir pourquoi", je n'y crois pas ;
et je ne crois pas à l'affolement qui fait perdre toute prudence à Ranucci, le projetant dans ce "raptus criminel" sans cet isolement préalable ; le danger pour sa vie est là ; il s'agit des Aubert ; alors la pulsion doit être enfouie, elle pourra bien se déployer plus tard ; mais pas là, car il sera pris irrémédiablement et ne pourra plus recommencer ;
son sang froid pour répondre aux Aubert atteste de sa maîtrise des évènements et non pas d'un affolement qui va le perdre ; s'il était vraiment en état de démence, il m'étonnerait qu'il ai pu leur répondre au lieu de se murer dans un silence forcé ;
Ou bien les Aubert ont menti ; ou bien ils ont parlé à un autre homme, qui effectivement, a instantanément compris qu'on le prenait pour un autre ; il a pu alors s'abandonner à sa pulsion "en toute quiétude" ; le "parasitage" du monde extèrieur ne s'avérant pas alors être une alarme, mais presque un atout, une bénédiction au vu des circonstances ;