Lundi 3 juin
"Le Provençal" (7 juin 1974) : "Qu'a-t-il mangé ? (en arrivant lundi soir)
Mme Mathon : Du jambon, un steak, des tomates à la provençale, du fromage, un dessert.
J : Et après, il est sorti, il est allé se coucher ?
M : Non, il a regardé la télé avec moi.
J : Quelle émission ?
M : Un film : hold-up extraordinaire, je crois."
Christian Ranucci ("Récapitulatif") : "Un peu plus tard, vers 17 heures peut-être, je quittais ces gens aimables et prenais la route de Nice.
Malgré l'encombrement des routes par endroits, le trajet retour se fit au mieux. J'arrivai à la Corniche-Fleurie vers les 21 heures, mis la voiture au garage et rentrai chez moi. Ma mère ne s'était pas encore couchée. Je pris un léger repas, puis essayai de trouver une émission de T.V. digne d'attention sur l'une des quatre chaînes. Mais le sommeil et la fatigue accumulée depuis la nuit blanche de dimanche furent les plus forts.
Deux verres d'eau minérale, la toilette, et je sombrai dans les draps de mon lit."
Héloïse Mathon ("Carnet") : "... A l'heure promise (vers 21 heures), mon fils rentra, m'embrassa et m'assura de sa pleine forme. Il n'avait pas changé de chemise, celle-ci était seulement un peu froissée... on mangea assez vite, car à la télé le film commençait... Christian ne me parle pas beaucoup de sa sortie. Voulant sans doute retarder ma peine, il ne me parle pas de son accident..."
Christian Ranucci (Audition du 5 juin à 19h) : "J'ai quitté cet endroit vers 18 heures. Je tiens à préciser que je ne puis être affirmatif sur les heures, n'ayant pas de montre en ma possession ce jour-là. Je suis rentré directement à Nice où je suis arrivé vers 22 heures."
Christian Ranucci (Audition du 6 juin à 1h30) : "Je suis reparti en direction de Nice, où je me suis rendu effectivement. Je suis arrivé chez moi vers 22 heures. Ma mère n'était pas couchée. Je ne lui ai pas dit que j'avais eu un accident matériel."
Programme de la troisième chaîne couleur ce soir-là :
20:40 Un hold-up extraordinaire (Gambit, avec Shirley MacLaine et Michael Caine)
22:25 Inter 3
Une phrase de madame Mathon retient mon attention : "on mangea assez vite, car à la télé le film commençait." Il était donc environ 20h40 quand Christian est rentré (les films commençaient à peu près à l'heure, à l'époque).
Deux ans après, il ne se souvient pas s'être intéressé à quoi que ce soit à la télévision ce soir-là, tandis que sa mère, tant à l'époque que plus tard, dit qu'il a regardé le film avec elle.
Je me demande aussi quelle peut être cette quatrième chaîne qu'il évoque.
Il parle d'un léger repas ; d'après sa mère, il était rapide, certes, mais pas vraiment léger.
Surtout, il insiste sur le fait qu'elle n'était pas encore couchée. Or, vers 20h40, il devait faire encore jour ce 3 juin, même si on n'avait qu'une heure d'avance sur le soleil à l'époque en été, je crois. Il avait promis de rentrer avant 21 heures, et visiblement, il a tenu parole, et sa mère ne semble pas du tout inquiète à son retour.
De plus, il l'assure "de sa pleine forme", ce qui contredit un peu l'hypothèse de la nuit blanche, car une mère voit ça (après une nuit d'ivresse et toute la route qu'il a faite, il devrait avoir les yeux rouges et des poches énormes, et avoir du mal à garder les paupières ouvertes, à cette heure-là).
Enfin, madame Mathon tient à nous dire qu'il n'avait pas changé de chemise (depuis son départ la veille, j'imagine). Or, Ranucci nous dit, lui, dans son "Récapitulatif", qu'il portait, "ce n'est pas contestable et pas contesté, un petit polo blanc à manches courtes" au moment de l'accident, et qu'il est par conséquent impossible qu'il ait été le fuyard aperçu par monsieur Aubert, car cet individu portait une chemise blanche à manches longues (dans l'imagination débordante de Ranucci seulement).
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