J’ai essayé d’imaginer trois hypothèses :
Innocence
Culpabilité
Complicité (l’une impliquant CR, l’autre n’impliquant pas CR)
INNOCENCE :
Il était seul au carrefour de la Pomme et ne s’est arrêté à l’aplomb du Lieu du crime que fortuitement (tête-à-queue et malencontreux hasard : mauvais endroit au mauvais moment).
Cela corroborerait la 1ère déclaration de Martinez : « paraissait seul à bord «.
Il faut admettre que Martinez a inventé tout ce qu’il a dit par la suite :
La forme blanche qu’il aurait vu basculer
Les Aubert lui ayant parlé d’un enfant
Le refus du gendarme de noter la présence d’un enfant
Il faut surtout admettre que les Aubert aient menti lorsqu’ils ont parlé d’enfant et que :
- soit ils n’ont rien vu du tout
- soit ils ont vu un homme (CR ou autre) avec un paquet
- soit ils ont vu un autre homme que CR avec un enfant.
Dans cette dernière hypothèse, ils auraient également menti lorsqu’ils disent qu’Aubert a regardé à l’intérieur du véhicule, puisque, si on admet que CR n’était pas l’homme qu’ils ont vu grimper le talus, il faut bien qu’il se soit trouvé inconscient dans la voiture, comme il le dira dans son récapitulatif.
Commentaires :
Le témoignage Aubert est sans conteste possible abracadabrant et je ne comprendrai jamais comment il a pu passer au procès. Et ce paquet est têtu puisqu’il se retrouve dans plusieurs PV.
L’explication selon laquelle les gendarmes auraient parlé de paquet après coup pour se couvrir de ne pas avoir immédiatement réagi aux dépositions Martinez et Aubert ne me convainc pas.
Cela supposerait que les gendarmes aient fait des faux après coup.
Question à Laurence, dont le mari est gendarme ou à Carmencita, qui a des policiers dans sa famille : est-il techniquement possible de détruire un PV et de le remplacer par un autre ? Je suppose tout de même que des garde-fous administratifs (carnets à souche ou autre système) ont été prévus pour empêcher ce genre de magouille.
Ce qui est écrit est écrit et il en reste forcément une trace. On ne peut pas purement et simplement déchirer un PV qui ne convient pas et le remplacer par un autre, non ?
En ce qui concerne le témoignage Martinez, je ne peux m’empêcher de lui trouver, chaque fois que je l’entends, un ton de sincérité. Je sais bien que cette impression, purement subjective, n’a aucune valeur, mais elle est tenace. J’ai beaucoup de mal à voir en Martinez un menteur.
Pour la « forme » qu’il lui aurait semblé voir basculer, encore, on pourrait penser qu’il s’est tout simplement autosuggestionné après coup (« Mais oui bon Dieu, mais c’est bien sûr ! C’était la petite !»).
Pour les Aubert revenant vers lui en lui parlant d’un enfant, ce n’est pas possible. Ou il dit vrai ou il ment sciemment.
CULPABILITÉ :
La petite était dans la voiture, c’était la forme que Martinez avait vu basculer, les Aubert ont dit vrai lorsqu’ils disent avoir vu un enfant et reconnu CR comme étant l’homme montant le talus avec la petite mais le gendarme qui a pris la déposition de Martinez n’a pas voulu noter la présence de l’enfant.
Dans ce cas, comme CR ne se dirigeait pas vers Marseille et ne s’est retrouvé dans cette direction que fortuitement (tête-à-queue), cela signifie soit que CR n’avait pas l’intention de reconduire la petite à Marseille, soit qu’il en avait l’intention mais qu’il voulait encore prolonger un peu la ballade en voiture, soit qu’il la conduisait pour la livrer à un éventuel complice, quelque part entre la Pomme et Aix ou autre.
Commentaires :
Le fait que le gendarme de Martinez n’ait pas voulu noter un détail qui, selon lui, n’avait aucune importance ne me paraît pas si invraisemblable. Il avait le numéro, le modèle et la couleur de la voiture, des témoins, pour lui, c’était amplement suffisant pour un accident de la route avec délit de fuite. Il était pressé de finir son repas, il n’allait pas s’embêter avec des « fioritures » …
Ce qui cloche dans cette hypothèse de culpabilité, c’est :
- le paquet
- la manière bizarre dont la déposition des Aubert est formulée :
ils disent en effet reconnaître en CR qui leur est présenté à l’Evêché
– je cite de mémoire - « l’homme qui a eu un accident au carrefour
de la Pomme et qui a pris la fuite » et non "l'homme que nous avons
vu monter le talus avec un enfant".
- Les 3 versions successives servies par les Aubert : paquet, enfant
muette, enfant qui parle.
- le cafouillage médiatique selon lequel les Aubert n’auraient pas reconnu
l’homme au tapissage, puis l'auraient finalement reconnu. J’ai moi-même entendu ce communiqué sur France Inter en direct de l’Evêché
COMPLICITÉ :
1. Complicité homme au pull over-rouge / CR
La petite a été enlevée par 2 hommes (le châtain ondulé d’ES et le cheveux noirs et courts de JR).
Supposons par hypothèse que le châtain était CR et le brun l’homme au pull over-rouge.
Si ES a bien vu une Simca, il faut admettre que les 2 hommes ont échangé leurs voitures pour brouiller les pistes.
Et là, 2 possibilités :
a)
C’est Ranucci que Spinelli a vu faisant monter la petite, tandis l’homme au pull over-rouge était planqué dans le coupé Peugeot quelque part à St Agnès et les voitures se seraient suivies.
Il y aurait eu un arrêt quelque part et la petite aurait changé de voiture.
Ensuite, CR serait reparti dans son Coupé Peugeot, mission accomplie, avec l’intention de regagner Nice. Accident, tête-à-queue, changement de direction. Martinez ne voit personne dans la voiture mais prétend ensuite (ou se persuade lui-même) qu’il a vu quelque chose. CR se serait arrêté par un malencontreux hasard là où on retrouvera la petite. L’autre type est dans les fourrés, a déjà tué la petite ou la tuera après.
Ensuite ? Je ne sais pas.
CR tombe-t-il inconscient sur son volant comme il l’a dit ? Si oui, je ne peux croire, pour des raisons que j’ai exposées un million de fois, à aucun scénario qui impliquerait que l’autre type ait perdu son temps à conduire CR inconscient dans la galerie.
b)
Il n’y avait qu’une seule voiture à Ste Agnès : la Simca de l’homme au pull over-rouge, conduite par CR. L’homme au pull over-rouge était planqué à l’arrière – version avancée par Anne.
Les 2 complices et la petite (bâillonnée et/ou ligotée à l’arrière) récupèrent la voiture de CR (cela aurait au moins le mérite d’expliquer le laps de temps très long entre l’enlèvement et l’accident), les types récupèrent leur voiture respective, la petite restant dans la Simca avec l’homme au pull over-rouge.
Et après ? Ils se suivent ? On peut le supposer puisque la petite sera retrouvée dans les mêmes parages que l’endroit où CR a eu un accident. Il faudrait alors imaginer que l’homme au pull over-rouge se soit arrêté à l’aplomb du Lieu du crime ou un peu plus loin et que CR ait continué pour rentrer à Nice, revenant ensuite involontairement sur ses pas suite au tête-à queue. Il serait alors arrêté par hasard là où on retrouvera plus tard le corps de la petite.
Commentaires :
Ce qui m’inclinerait à envisager une complicité, c’est le fait que JR et ES semblent ne pas avoir vu le même homme.
Ce qui irait aussi éventuellement dans le sens d’une complicité incluant CR, c’est, pour moi du moins, le fait que je crois de moins en moins à la nuit de biture passée dans les bars du quartier de l’Opéra.
J’ai toujours été sceptique pour la raison que j’ai toujours indiquée : j’avais du mal à m’imaginer qu’aucun patron de bar, client ou serveur n’ait reconnu CR, dont la photo s’étalait dans tous les journaux.
Je suis plus sceptique encore depuis que j’ai appris par une personne connaissant bien Marseille que le quartier de l’Opéra, contrairement à ce que je m’imaginais, ne comprenait que 4 ou 5 bars resserrés dans un périmètre limité.
De plus, j’ai toujours été étonné que Guazzone et Rahou, en fin d’après-midi, aient tous les deux perçu CR comme propre, net, soigné. Ils ne disent ni qu’il était rasé ni qu’il ne l’était pas mais il me semble que, s’il avait eu une barbe datant de la veille au matin, il n’aurait pas fait sur eux une impression aussi clean.
Cela m’incite à croire qu’il avait dû avoir le matin la possibilité de se laver et de se raser. Donc, qu’il avait passé la nuit chez quelqu’un. Certes, il n’est pas impossible de se raser dans les toilettes d’un café, mais c’est plus improbable qu’il l’ait fait. Entre parenthèses, j’aimerais bien savoir si on a trouvé dans ses affaires un rasoir électrique.
S’il y a eu complicité homme au pull over-rouge /CR, je pencherais plutôt pour la version b : enlèvement à Ste Agnès en Simca et homme au pull over-rouge planqué à l’arrière car ce scénario expliquerait l’étrange docilité de cette petite, qui n’aurait pas essayé de s’enfuir ou de se révolter pendant tout le trajet alors que la voiture a dû traverser de nombreux villages et s’arrêter à de nombreux feux rouges ? Si les choses se sont passées comme cela, on peut imaginer que, dans un premier temps (une seule voiture, la Simca, avec les 2 types), l’homme au pull over-rouge aurait ligotée et baillonné la petite pour qu’elle se tienne tranquille. Lors du changement de voiture, CR aurait repris la sienne et l’homme au pull over-rouge aurait pris le volant de la Simca, laissant la petite ligotée à l’arrière ou dans le coffre.)
Après l’accident et le tête-à-queue qui a obligé CR à faire demi-tour, on peut imaginer plusieurs possibilités :
- CR s’arrête là où les Aubert ont vu sa voiture parce qu’il n’a pas remarqué qu’il était suivi, qu’il sait que c’est là que s’est arrêté son complice et qu’il recherche son aide pour ses dégâts matériels. Cela collerait avec le fait qu’il dit dans ses aveux : « Je n’ai pas remarqué que j’étais poursuivi ».
- CR s’arrête là où les Aubert ont vu sa voiture par le plus malencontreux des hasards. Après ? On peut imaginer ce qu’on veut : son complice a déjà tué la petite (il aurait fait vite, quand même ..), se tient tapi dans les fourrés et assiste à l’interpellation Aubert.
Comment ensuite CR s’est-il retrouvé dans la galerie ? Même problème que plus haut, je ne crois à aucun scénario dans lequel le meurtrier aurait conduit la voiture de CR inconscient dans la galerie.
- Même scénario que le précédent sauf que la petite est encore vivante.
l’homme aux cheveux noirs/POR ne la tuera que plus tard.
Commentaires :
Où se trouvait la Simca de l’homme au pull over-rouge pendant ce temps ?
Je vois 3 possibilités :
- Elle était garée sur le bord de la route, mais beaucoup plus loin en
s’éloignant de la Pomme, sinon, les Aubert l’auraient vue lorsqu’ils ont
fait demi-tour.
- Elle était planquée dans les fourrés. Par ex. : sur le chemin de droite
lorsqu’on arrive au bout du chemin menant à la champi.
- Les Aubert se sont trompés et ils ont vu la Simca au lieu du Coupé
Peugeot.
Je ne note cette hypothèse que par acquis de conscience car je n’y crois
pas une seconde. D’abord, les Aubert ont de toute évidence relevé le
numéro.
Je ne pense pas que Martinez leur aurait demandé de poursuivre le
gars s’il avait le numéro complet et était sûr de lui. Ensuite, si l’on admet que Spinelli, carrossier, ne pouvait confondre une Simca et une Peugeot, on peut supposer qu’Aubert, gérant d’une société de location de véhicules, n’était peut-être pas tout à fait nul non plus dans ce domaine. D’autant que, s’il a fait demi-tour, il a pu voir la voiture de face et de l’arrière.
L’hypothèse selon laquelle les Aubert auraient vu la Simca de l’autre homme est à mon avis presque impossible à soutenir.
2. Complicité homme au pull over-rouge / homme mince cheveux châtain clair non identifié
La petite a été enlevée par 2 types, dont l’un (le brun de JR) était peut-être l’homme au pull over-rouge et par un autre (le châtain clair de Spinelli), qui présentait globalement la même allure générale que CR mais n’était pas CR.
Il n’y avait qu’une voiture à Ste Agnès, la Simca 1100 grise que Spinelli a vu et le brun / l’homme au pull over-rouge était planqué à l’arrière.
Cela expliquerait que la petite n’ait pas essayé de s’échapper.
Dans cette hypothèse, CR aurait joué de malchance :
- mauvais endroit au mauvais moment
- ressemblance physique avec l’un des ravisseurs
- voiture présentant des ressemblances avec la voiture d’un
des ravisseurs
- arrêt fortuit à l’aplomb du Lieu du crime
REMARQUES FINALES
Je n’ai avancé dans ce qui précède que les quelques commentaires qui me sont venues spontanément à l’esprit.
Je n’ai parlé ni du couteau, ni du pantalon, ni de l’étrange passivité et du système de défense aberrant de CR pendant ces deux années, ni de bien des choses encore et ne prétends pas avoir traité le sujet de manière exhaustive, loin s’en faut !
Tout ce qui précède n’est qu’une tentative d’envisager dans les grandes lignes les principales hypothèses possibles.
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