Citation :
Le lendemain, 5 juin, monsieur Vincent Martinez a lu la presse et a fait aussitôt un rapprochement avec l’accident dont il a été victime le 3 juin. Il a donc téléphoné dans la matinée à la gendarmerie de Gréasque où il avait déposé plainte le 3 juin et fait part de ses soupçons.
En fin de matinée, il téléphone à l’Evêché où il est mis en contact avec le commissaire Alessandra alors que celui-ci est allé manger au mess du commissariat central de police. Il l’informe de ce que les témoins de la poursuite du fuyard lui ont raconté à leur retour.
Le même jour, vers 12 h 30, madame Aubert, contactée dans la matinée par la gendarmerie de Toulon, demande à son mari d’appeler les gendarmes de Gréasque. Ceux-ci veulent connaître avec précision l’endroit où le fuyard s’est arrêté, sur le bord de la Nationale. Monsieur Aubert donne le renseignement. Il est alors invité à téléphoner à l’Évêché, à la brigade criminelle.
Et c’est ainsi que le commissaire Alessandra reçoit son appel.
Fort de ces informations dont il mesure toute l’importance, le commissaire rend compte immédiatement au substitut du procureur de la République qui suit cette affaire, monsieur Marnet.
Ce dernier prend aussitôt contact avec le juge d’instruction qui vient d’être désigné : Mlle Di Marino.
Quarante-cinq minutes après l’appel de monsieur Aubert, le capitaine Gras, commandant la compagnie de gendarmerie d’Aubagne, avisé par le commissaire Alessandra qui agit, lui, sur commission rogatoire de Mlle Di Marino, commence à mettre en place un dispositif de recherches aux fins de ratisser l’endroit où le conducteur du coupé Peugeot a été vu, s’enfuyant dans les taillis, par les époux Aubert.
La thèse est claire, c'est Alessandra qui requiert la Gendarmerie pour commencer les recherches. Ce qui est moins clair c'est qu'on parle de la gendarmerie '"avisée par" et non "requise par" comme il serait normal.
Citation :
A 10 heures Mr Martinez, conducteur du véhicule accidenté, ayant déposé la plainte, avertissait téléphoniquement la brigade Gréasque, que venant d'avoir connaissance de l'enlèvement de la petite Rambla à Marseille le 3 juin, une heure et demie avant l'accident dont il avait été victime il pensait qu'il pouvait y avoir une relation entre ces faits et que contrairement à ce qu'il avait déclaré dans sa plainte il pensait qu'un enfant avait pu se trouver dans le véhicule tamponneur
A 10 heures 30, afin d'avoir des précisions sur le lieu où le témoin avait aperçu le véhicule "Peugeot" arrêté en bordure de la R.N.8 bis la brigade de Gréasque, alertait celle de Toulon, d'avoir à contacter Mr Aubert, afin qu'il se mette dès que possible en relation téléphonique avec Gréasque.
Madame Aubert pouvait entrer en relation avec son mari, qui à 12 heures 30, donnait au commandement de brigade de Gréasque les précisions suivantes:
(...)
Les O.P.J. et A.P.J. qui nous ont secondé dans ces opérations sont cités nominativement dans la procédure, chaque fois qu'ils ont accompli un acte dont ils ont été chargés.
II ENQUETE
A 13 h 15 au recu des informations suscitées, nous nous transportons sur les lieux aux fins de mise en place d'une opération de recherche par ratissage de la zone boisée bordant au Nord la R.N.8 bis à partir du carrefour des R.N.8 bis et 96
(...)
A 15h50: Mr le Procureur de la République à Marseille est avisé de la découverte du corps: il nous indique qu'une information est ouverte
Mlle Di Marino Juge d'Instruction nous prescrit de laisser les lieux en l'état en attendant son arrivée, celle du médecin légiste et des fonctionnaires de police porteurs d'une commission rogatoire.
Il est simultanément rendu compte de nos opérations et constatations au Colonel, commandant le Groupement de Gendarmerie des Bouches-du-Rhône.
(...)
A 15 h 55 un message radio est adressé à la Gendarmerie de Nice en vue d'apréhender Ranucci, Christian auteur du délit de fuite et soupçonné du meurtre de la jeune Rambla
(...)
A 18 h 30, Ranucci, Christian était apréhendé par les militaires de la brigade de Gendarmerie de Nice-Ouest.
Ce PV aussi est très clair. Il n'y est fait aucune mention d'invitation à quiconque à appeler l'Evêché et encore moins de réquisition pour effectuer des recherches. Quand réquisition il y a, les termes employés sont très clairs:
Citation :
le 6 juin 1974, à 17 heures 30, sur réquisition de Monsieur le Commissaire Principal Alessandra, chef de la Sureté Urbaine à Marseille, agissant lui-même sur Commission Rogatoire de Mlle Di Marino...
Ce sera la première réquisition de la gendarmerie par Alessandra, et ce pour chercher le couteau.
Le PV mentionne même que l'arrestation de Ranucci "soupçonné du meurtre" est à l'initiative du Cap. Gras. Et ce, grâce à un message envoyé à Nice 5 minutes après que la juge lui dise de tout laisser en place et d'attendre son arrivée ainsi que celle de la Sureté. Elle n'avait pas dit de n'appeler personne.... On n'est pas hors-jeu.
Ceci ajouté au télégramme du 5 juin laisse penser que la Sureté n'était en fait au courant de pas grand-chose et a repris l'affaire au vol derrière la Gendarmerie, qui elle avait tout simplement entamé une enquête pour délit de fuite. Au sens strict, ils n'ont pas violés les règles de la procédure.
On pourrait n'y voir qu'un simple exemple de concurrence mal comprise entre polices, mais les répercussions vont être graves pour Ranucci et expliquent très bien l'évolution soudaine du témoignage des Aubert dès qu'ils sont à l'Evêché.
Donc qui dit la vérité (ou ment)? Alessandra, Bouladou ou le PV du Cap Gras?