QUESTION 1
Nous sommes des auxiliaires de Justice.
Le rôle d’un expert est d’assister les magistrats. Dans son domaine d’expertise, il leur fournit le maximum d’informations, d’analyses objectives aidant ainsi ces magistrats à rendre la Justice en toute sérénité.
Nos conclusions sont des outils permettant aux magistrats de conforter l’enquête menée.
Je suis heureux de ce rôle mais aussi des recherches scientifiques que cela engendre.
QUESTION 2
Les magistrats de l’Instruction sont ceux qui me sollicitent majoritairement.
Les magistrats du Parquet et sous leur accord les enquêteurs en charge du dossier, peuvent également me solliciter mais cela reste rare.
Le but de cette sollicitation est :
- Dans le cadre de la morphoanalyse de traces de sang :
** de leur donner le maximum d’informations quant au déroulement des faits au travers des traces de sang présentes sur les lieux visualisées suite à un déplacement ou à l’aide de la planche photographique réalisée par les enquêteurs
** déterminer le rôle de chacun au travers des traces de sang souillant leur tenue vestimentaire et/ou de celles qu’ils peuvent supporter sur la peau
** déterminer les traces les plus pertinentes pour une analyse génétique.
- Dans le cadre de la Criminalistique :
** apporter une synthèse compréhensible des éléments techniques des différentes expertises menées sur un lieu
** déterminer si de nouvelles investigations sont pertinentes et dans quels domaines.
QUESTION 3
La méthodologie suivie comporte plusieurs points :
1. Après avoir déterminer l’utilité de mon intervention avec le requérant, je me déplace sur la scène à étudier.Avant de commencer l’analyse et le recueil de données, j’interroge les techniciens de la police technique et scientifique pour connaître les modifications apportées au lieu étudié.
2. Je répertorie les traces observées, les décrit.
3. Une 2ème personne présente les photographie.
4. De retour au bureau, une 3ème personne étudie les traces au travers des clichés réalisés. Notre identification de terrain est ainsi vérfiée .
5. Cette vérification est elle-même revue par moi au moment où je reprends le dossier pour d’abord faire l’interprétation des traces identifiées.
6. Ensuite, j’obtiens le rapport d’autopsie et des auditions pouvant décrire des interventions antérieures à l’action des enquêteurs. Je réalise alors une interprétation spécifique aux éléments de dossier qui décrit donc les faits découlant des traces étudiées.
7. A la demande des magistrats, je peux compléter mon analyse en vérifiant si des déclarations décrivant les faits sont compatibles ou non avec nos analyses. Je prends alors connaissance de ces déclarations et compare les traces pouvant résulter des faits décrits avec celles observées sur site. J’établis alors la compatibilité ou non des déclarations avec mes conclusions.
A ce jour, je dépasse le millier d’expertises (13 ans d’activité) avec quelques dossiers médiatisés comme le Grand Bornand, la tuerie d’Huos, Pierrot le fou...
QUESTION 4
Je ne connais pas la loi Seznec de 1989 mais je pense que l’avis d’un expert pourrait être un fait nouveau, surtout s’il s’agit d’une discipline qui n’avait pas été utilisée auparavant.
AFFAIRE RANUCCI
Il y a bien longtemps, j’ai lu le livre "le pull-over rouge" mais je n’en ai que de vagues souvenirs.
Je me rappelle bien plus du contexte populaire lors de son jugement et cela suite de visionnage d’émission.
1)
Les traces étudiées sur le pantalon résultent d’une imprégnation alors que le pantalon est porté par une personne assise.
Cette imprégnation résulte :
- soit d’un contact avec un élément couvert de sang liquide et dont la forme est proche du contour de la trace observée,
- soit d’un goutte à goutte d’un élément dont s’écoule du sang et qui se situe à la verticale de la zone souillée (jambe gauche du pantalon).
Ainsi, cette trace ne peut pas être consécutive de coups portés à une tierce personne par le porteur du pantalon.
Dans le cadre des blessures constatées sur la victime et dans l’hypothèse où cette trace est l’unique présente sur ce pantalon, ce vêtement ne peut ni être porté ni même être présent à proximité des faits de violences
2)
La forme en papillon est typique d’imprégnation alors que le pantalon est porté par une personne assise.
Donc la position assise du porteur m’est venue en premier.
La forme ensuite qui est typique d’une imprégnation dans le cas d’un goutte à goutte.
Un contact avec un élément fortement ensanglanté reste possible mais il faudrait qu’il ait cette forme de papillon.
Une action violente n’était pas du tout caractérisée malgré toutes les hypothèses envisagées.
Dès que j’ai fini mon observation, j’ai lu les informations concernant les plaies et à l’évidence le pantalon ne pouvait être celui porté lors des faits par l’agresseur.
3)
Il reste la possibilité ou la victime est à la verticale de la zone souillée du pantalon alors que le porteur de ce pantalon est assis.
............ ( voir paragraphe ) en l'absence de cet element essentiel , votre avis peut il etre aussi categorique ?
OUI
4)
Cet élément est inutile à mon raisonnement (voir méthodologie décrite au point 3). Il vient ensuite pour que je puisse établir s’il existe une compatibilité ou non entre mes conclusions et les déclarations du mis en examen.
est il possible d'envisager les 2 cas suivants .......... ** transport alors que l'enfant n'etait pas encore morte ** transaport post-mortem
La trace témoigne d’une position assise. Elle est donc difficilement compatible avec une aide à un transport ou alors il faut que le porteur du dit pantalon réalise le transport en restant assis.
Ces deux hypothèses ne sont pas compatibles avec les traces étudiées.
5)
Je ne suis pas sur de comprendre la question.
S’il s’agit de source d’informations cocnernant la preuve de la commission d’actes violents, il faudrait des vues des surfaces avoisinantes (plutôt verticales) le lieu de découverte de la victime et la tenue complète du suspect.
La tenue de la victime n’apporte aucun élément utile à nos analyses pour prouver la réalisation d’actes violents.
6)
Cette hypothèse est compatible avec la trace étudiée.
Mes réponses précédentes expliquent pourquoi ce scénario est très plausible avec la trace étudiée.
7)
Non. Impossible sur une telle surface cela reste rare d’une trace à l’autre sur un vêtement. Souvent les traces initiales restent perceptibles, surtout des projections qui contiennent toujours peu de sang
Je ne comprends pas cette question.
Cependant, je peux dire que cette trace ne peut résulter de la commission des faits. S’il s’agit de l’unique trace que supporte ce pantalon, ce dernier n’était alors pas porté par l’agresseur au moment de la commission des actes violents et sanglants
9)
Il s’agit des hypothèses mises en avant lors de l’observation du pantalon (voir la question 1 de l’étude du pantalon)
10)
Le positionnement et le tracé sont fortement compatible avec une épistaxis, beaucoup moins avec une blessure au visage qui saigne moins.
En ce qui concerne la densité, cela est pour moi plausible mais un médecin sera un meilleur conseil pour déterminer la quantité de sang que l’on peut perdre avec une telle blessure avant sans que cela soit préjudiciable à l’état d’éveil de la victime saignant du nez.
Si nous détenions encore le pantalon, il aurait été possible de quantifier le volume de sang .
11)
Les traces ne montrent rien de plus que ce qui est écrit ci-dessus.
12)
Peu probable, étant donné le nombre des blessures et la violence constatée.
13)
Ma conclusion est qu’il ne peut porter ce pantalon au moment des faits sanglants qu’il affirme avoir réalisé.
La trace sur l’entre cuisse de ce pantalon montre qu’il est porté par un individu assis alors qu’un élément fortement ensanglanté incluant le porteur même, perd du sang alors qu’il se trouve à la verticale de la zone souillée.